Plus de blé, plus de reflux

Plus de blé, plus de reflux

S’il s’agissait de raconter uniquement l’histoire de la douleur de mon RGO, il n’y aurait rien à dire, car je n’ai jamais ressenti la douleur typique qui brûle en remontant l’œsophage. C’est tout juste si je ressentais une petite impression de chaleur au niveau de l’œsophage. Le goût quelque peu désagréable, voire le passage du liquide gastrique dans les poumons masquaient complètement les symptômes œsophagiens. Parfois, c’était une petite douleur localisée et placée au niveau de l’estomac. Je me rappelle qu’à l’âge de huit ou dix ans, j’étais déjà habitué à avoir des périodes de remontées acides en bouche, des quintes de toux, une gêne au niveau de l’estomac. Le conseil de l’époque était : « Bois un grand verre de lait, ça va passer. » Je me souviens aussi d’épisodes réguliers de « rhumes ». Ces maladies commençaient toujours de la même façon : d’abord un mal de gorge, puis le nez qui se bouche et ensuite, très souvent, la bronchite et ses sécrétions. Je n’avais jamais de fièvre. Je me souviens aussi, vers ma plus tendre enfance, d’épisodes de nausées avec des séries de vomissements difficiles à interrompre.

Mauvais diagnostics et mauvais traitements

De temps en temps, quatre à six fois par an, ma mère, qui en avait assez de m’entendre tousser, m’emmenait chez le docteur. Il nous parlait d’angines tombant sur les poumons, de bronchites avec pharyngites, de rhino-pharyngites avec surinfection bronchique, de mauvais rhumes… ! Le traitement a évolué dans le temps. Au début, il concernait uniquement les symptômes puis, vers les années 1970, c’était l’infection elle-même qui était visée avec l’antibiothérapie. Mais, quel que soit le traitement, l’affection durait deux à trois semaines.

Les limites des traitements médicamenteux

En 1980, pendant mon service militaire, je suis allé consulter pour la première fois pour ces remontées et ces petites douleurs d’estomac. J’en suis ressorti avec du sirop antiacide qui me soulageait assez bien. C’était plus efficace et plus facile à obtenir qu’un verre de lait ! En 1983, mes épisodes de gastralgie (douleurs d’estomac) étant de plus en plus fréquents et d’une durée de plus en plus longue, mon nouveau médecin de famille me conseilla d’aller voir un gastro-entérologue. Une endoscopie gastrique a permis de découvrir un ulcère duodénal qui a été traité par anti-H2, et je fus tranquille pendant trois mois. À la fin du traitement, la routine de mes petites misères s’est remise en place : bronchites traitées par antibiotiques, gastralgies traitées par des pansements antiacides. Comme je travaillais pour l’industrie pharmaceutique, j’avais dorénavant les moyens de me procurer le médicament miracle en échantillon gratuit, de le prendre à la demande et ainsi, d’échapper à l’endoscopie qui n’est pas l’examen le plus agréable. J’avais ainsi résolu mes gastralgies, mais mes « maladies bronchiques » continuaient et étaient traitées par antibiotiques à raison de 3 à 6 traitements par an. En 1995, au cours d’un épisode de mal de gorge un peu plus important et bizarrement long, sans bronchite, je me suis dit que je devais avoir une tumeur à la gorge. Je suis allé voir un ORL qui m’a rassuré. Il m’a dit que c’était certainement dû à une remontée du liquide gastrique et qu’il fallait que je retourne voir un gastro-entérologue. Je pris donc mon anti-H2, et ma douleur de gorge disparut rapidement. Une nouvelle endoscopie permit de découvrir une œsophagite discrète signant un reflux gastrique. On me prescrivit alors le médicament bloquant le plus l’acidité, un IPP que je pris en cas de douleur d’estomac et/ou de mal de gorge.
Entre ces traitements, je continuais à faire des bronchites « infectieuses » que mon médecin de famille traitait toujours par des antibiotiques. Petit à petit, les périodes sans traitement par IPP devenaient de plus en plus courtes, tandis que les bronchites diminuaient en fréquence et en gravité.

Le « miracle alimentaire »

C’est en 2000 que j’eus la chance de découvrir le livre du Dr Jean Seignalet, L’alimentation ou la troisième médecine. À l’époque, je souffrais d’une tendinite du coude, récalcitrante à tous les traitements, avec ossification des tendons et qui était très invalidante. Dans son livre, le Dr Seignalet proposait une approche nouvelle à peine croyable pour une personne comme moi qui avait toujours baigné dans un environnement médical. Ses arguments semblaient d’une telle rigueur scientifique que j’eus fortement envie d’essayer ses conseils diététiques. J’ai profité d’un contrôle coloscopique et donc du nettoyage du tube digestif pour mettre en place l’évitement des céréales modernes (froment, blé tendre, blé dur, seigle, orge, avoine) en association avec des probiotiques. J’aurais bien voulu aussi éliminer le lait, mais c’était impossible à faire car je devais alors passer 15 jours de vacances au ski en pension complète. Les résultats ont été véritablement stupéfiants. Les douleurs aux genoux, que j’avais systématiquement depuis l’âge de 16 ans dès que je les sollicitais, disparurent définitivement (on me disait que c’était génétique et qu’il n’y avait donc rien à faire si ce n’est poser des prothèses !). Ma tendinite ne semblait plus évoluer. Je ne sentais plus de remontée acide vers la gorge. Aussi, je me décidai à arrêter progressivement l’IPP que je prenais en continu depuis près de trois ans. Avant cela, tout arrêt était sanctionné par une reprise quasi immédiate de mes maux de gorge. Mais là, un véritable miracle se produisit. J’avais réussi à arrêter un traitement médicamenteux sans ressentir de douleurs, trois semaines après l’arrêt des céréales modernes ! C’était d’autant plus inespéré qu’à aucun moment le Dr Seignalet n’avait décrit une efficacité de ses conseils dans ce type de pathologie. L’euphorie fut cependant de courte durée.

Éradication des céréales et des produits laitiers

Moins d’une semaine après (soit quatre semaines après le début de l’élimination des céréales modernes), une gastralgie et un mal de gorge refaisaient leur apparition. Je repris 4 à 5 jours d’IPP et, une fois les douleurs disparues, j’arrêtai de nouveau le traitement. Rentré de vacances et, devant ces premiers résultats plus qu’encourageants, je complétais les conseils diététiques du Dr Seignalet et arrêtais complètement les laits animaux. De nouveaux miracles se produisirent : migraines et insomnies disparurent, mais aussi acné, douleurs abdominales avec tendance à la diarrhée, dont je ne parlais pas parce qu’elles semblaient faire partie de ma vie de tous les jours. Cependant, de temps en temps encore, des rechutes de mon reflux survenaient, même si deux jours de traitement suffisaient à le supprimer. Très rapidement, j’ai compris ce qui se passait. Ces douleurs apparaissaient systématiquement environ deux heures après une prise involontaire de blé. La preuve était faite pour moi. Les tests de réintroduction étaient tous positifs, même à mon insu. Ce n’était pas psy, comme on l’entend trop souvent ! La chasse au blé s’ouvrait, et mes rechutes se firent de plus en plus rares et de moins en moins graves. Il y a seulement sept ans que j’ai fait le rapprochement avec mon fils qui se plaignait de temps en temps de gastralgie et de vomissements comparables à ce que j’avais vécu. Les effets de la suppression du blé moderne et le remplacement par des céréales ancestrales ne se sont pas fait attendre chez lui non plus. Depuis quatre ans, je ne prends plus d’IPP ; je n’ai pas eu de bronchite ni de traitement par antibiotiques depuis huit ans. Voici le classement des céréales que j’ai pu établir par rapport à mes réactions, de la plus toxique à la moins toxique : le blé tendre ou froment (une quantité extrêmement faible suffit pour me déranger), le blé dur, puis, à égalité, le seigle, l’orge, l’avoine et le kamut (je peux en prendre 2 ou 3 rations normales de suite, avant de ressentir mes symptômes). Le grand épeautre du nord ne me pose pas de problème à partir du moment où il n’est pas pollué par du froment. Malheureusement, c’est souvent le cas du pain et même de la farine de grand épeautre. C’est sans aucun doute le petit épeautre (le vrai blé ancien) que je tolère le mieux, mais je dois faire attention aux contaminations. Ma solution est de l’acheter en grains pour le consommer tel quel après cuisson, ou mieux en pain avec du levain pur, ou encore mieux faiblement germé (pain essène, faiblement cuit ou cru). J’ai pu réintroduire à petites doses le fromage de chèvre et de brebis.

Commentaire du Dr Cotinat

La belle et longue histoire de Vincent montre l’effet étonnant des modifications alimentaires sur le reflux mais aussi sur les autres pathologies associées, très nombreuses dans son cas : ulcère, tendinite, douleurs articulaires, bronchites, rhumes, acné, colopathie avec tendance à la diarrhée, migraines, insomnies… Le bilan pratiqué chez lui n’a pas montré de maladie cœliaque. Il supporte bien le petit épeautre qui contient du gluten, mais à dose beaucoup plus réduite que dans le blé. Des études récentes évoquent la toxicité du gluten chez les personnes non atteintes de maladie cœliaque et ainsi, on peut imaginer que l’augmentation régulière des doses de gluten dans l’alimentation moderne puisse favoriser de nombreuses pathologies. Vincent a eu le courage de balayer ses habitudes alimentaires pour en adopter de nouvelles qu’il apprécie énormément sans ressentir aucune frustration. Il a découvert le secret du changement alimentaire durable.

Pour aller plus loin

Pour en savoir plus sur le régime Seignalet, lire :

Pour en savoir plus sur le gluten, le lait ou adopter une alimentation sans gluten et sans lait, lire :

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