Impliqué dans le "malaise vagal", le nerf vague remplit des fonctions vitales dans l'organisme. Quels sont les symptômes d'un dysfonctionnement du nerf vague ?
La biologie du nerf vague ou nerf pneumogastrique
Anatomie : le trajet du nerf vague
Le nerf vague (NV), aussi appelé nerf pneumogastrique ou nerf X, est un nerf crânien qui s’étend depuis le crâne à d’autres organes du corps : le cœur, toutes les voies respiratoires, l’estomac, le foie, les reins, le pancréas, l’intestin… Dans le thorax et l’abdomen, le trajet du nerf vague se divise en deux grandes branches, allant des deux côtés du corps : nerf vague gauche et nerf vague droit.
Le nerf pneumogastrique prend son origine dans le tronc cérébral, une région du cerveau impliquée dans les fonctions automatiques de l'organisme. Par exemple, le système nerveux autonome gère le rythme des battements du cœur, le rythme respiratoire, la dilatation ou la constriction des vaisseaux sanguins (et donc la pression artérielle), la digestion...
Les fonctions du nerf vague
Le NV possède 4 grandes fonctions :
- 80 % des informations qui circulent via ce nerf sont dites afférentes, c’est-à-dire qu’elles circulent depuis les organes jusqu’au cerveau ;
- 15 % de l’information qui transite par le NV correspond à la fonction parasympathique et essentiellement à la régulation de la portion digestive du système nerveux autonome ;
- 4 % des informations du NV sont dites modales : il s’agit de signaler aux muscles du système respiratoire, gorge, cordes vocales, muscles de la nuque et du visage de nous aider à respirer, ne pas s’étouffer, bien mastiquer, etc ;
- 1 % de l’information du NV se situe sur une toute petite portion de la peau des oreilles.
Le nerf vague permet aussi de réguler la voie cholinergique anti-inflammatoire. Il contrôle ainsi de nombreuses informations partagées entre le corps et le cerveau.
Et quand il fonctionne mal, que se passe-t-il ? Quels sont les symptômes d'un dysfonctionnement du nerf vague ? Des troubles de la variabilité cardiaque, de l’hypertension… Tour d'horizon.
Intestin, vertiges, cœur... Les conséquences d'un dysfonctionnement du nerf vague
1. Une mauvaise respiration
La raison la plus fréquente de la mauvaise signalisation vagale, c’est une mauvaise respiration. Beaucoup de personnes respirent de façon incorrecte et inefficace. Cette mauvaise façon de respirer est à l’origine de nombreux problèmes nerveux. Étant donné que les mouvements d’expansion et dépression thoracique que nous effectuons ne sont pas suffisants, nous ne dilatons pas efficacement nos poumons et le rôle de signalisation du nerf vague s’en trouve affecté. Autrement dit, la transmission de signaux par le nerf vague perd en efficacité à mesure que notre respiration est elle-même moins efficace ! Ce qu’il y a d’important à retenir, c’est que nous pouvons exercer nos nerfs à transmettre des signaux plus efficacement et à améliorer leur fonctionnement.
2. Des problèmes digestifs
Une séquence digestive optimale dure environ 16 à 20 heures, de l’ingestion des aliments à l’élimination des déchets. Comme l’activation du nerf vague est responsable du séquençage de la digestion ainsi que du péristaltisme, tout dysfonctionnement du nerf vague peut conduire à des troubles digestifs.
Pour fonctionner de façon optimale, le NV a besoin d’un niveau de stress peu élevé. La digestion ne s’effectue correctement que si les bons signaux sont transmis par le NV, et si chaque étape dispose du temps nécessaire pour s’accomplir.
Lorsque notre corps est en phase de repos et de digestion (en état parasympathique, donc), les fibres du nerf vague stimulent les muscles de l’estomac pour les mettre en action. Elles transmettent aux cellules pariétales de l'estomac l’ordre de produire et de sécréter de l’acide chlorhydrique (HCl) ; aux cellules principales, celui de produire et de sécréter deux enzymes digestives, la pepsine et la gastrine dans les sécrétions gastriques ; aux cellules musculaires lisses de l’estomac, celui de brasser les aliments contenus dans ce dernier, puis de les pousser vers l’intestin grêle.
"Si le nerf vague est endommagé et n’envoie pas ces signaux aux cellules de l’estomac, explique Navaz Habib, auteur du livre Activez votre nerf vague, il peut en résulter des troubles digestifs, telles la gastroparésie (paralysie des muscles de l’estomac) ou l’hypochlorhydrie (niveau insuffisant d’acidité gastrique), qui peut entraîner de nombreux autres problèmes de santé."
Quand on avale un morceau à la volée le matin en sortant de chez soi, on mange en situation stressante. Quand on déjeune devant l’ordinateur, au bureau, on mange dans un environnement stressant. Pour optimiser le séquençage digestif et la signalisation du nerf vague vers et depuis le tube digestif, il est impératif de prendre la plupart de ses repas dans un environnement aussi peu stressant que possible. Pour cela, il faut prendre le temps de s’asseoir, et manger dans un endroit favorisant la détente. Vous éviterez ainsi de nombreux troubles digestifs.
3. Un microbiote déséquilibré
Même si on ne sait pas encore précisément comment le nerf vague communique avec le microbiote et quels micro-organismes intestinaux activent les voies afférentes vagales, de nombreuses recherches ont montré qu’une importante proportion des effets du microbiote intestinal sur les fonctions cérébrales dépend de l’activation du NV et de sa signalisation spécifique. Parmi les sous-produits du métabolisme bactérien se trouvent des molécules, les acides gras à chaîne courte (AGCC), qui jouent un rôle clé dans la réduction de l’inflammation de l’intestin et, plus généralement, de l’organisme. Les sous-produits de la dégradation bactérienne des aliments sont signalés par 1 % des cellules intestinales au nerf vague, qui informe à son tour le cerveau de l’activité digestive. C’est pour cela que le nerf vague joue un rôle clé en cas d’obésité et de suralimentation. La composition du microbiote intestinal a ainsi des effets très spécifiques non seulement sur la fonction digestive, mais également sur les nerfs qui transmettent des signaux au sein du système nerveux entérique et sur le nerf vague lui-même. Assurer l’équilibre de la flore microbienne intestinale permet d'assurer un fonctionnement optimal non seulement à l'appareil digestif, mais aussi à la signalisation du nerf vague.
4. Une mauvaise variabilité cardiaque
L’un des signes qui indiquent un dysfonctionnement vagal est qu’après une émotion forte ou un événement stressant (éviter un accident de la route par exemple), la fréquence cardiaque ne se normalise que lentement et la respiration reste longtemps superficielle. La personne capable de se calmer et de ralentir son rythme cardiaque rapidement a un nerf vague qui fonctionne très bien. Comment réagissez-vous à la suite d’un fort stress ? Savez-vous garder votre calme ? L’inverse, c’est-à-dire un nerf vague mal contrôlé, trop actif, peut aussi arriver (voir ci-dessous dans le cas du malaise vagal). C'est aussi le nerf vague qui explique les effets de la cohérence cardiaque.
C'est quoi un malaise vagal ?
Le malaise vagal, ou syncope vasovagale, est un trouble majeur provoqué par un système nerveux sympathique peu actif et un nerf vague hyperactif. La conjonction d’une activité sympathique faible et d’une hyperactivité vagale se traduit par une perte de connaissance brève.
5. Une inflammation chronique
Le nerf vague a pour effet de ralentir l’inflammation et de la maîtriser. Mais un nerf vague qui reçoit des messages d’inflammation récurrents sur une longue période va perdre progressivement cette capacité., ce qui peut favoriser divers troubles liés à l'inflammation chronique. En même temps qu’on s’occupe de trouver les facteurs déclencheurs de l'inflammation, il faut stimuler le tonus vagal pour limiter les dommages. On y parvient en faisant des exercices pour améliorer la signalisation et, par ricochet, contrôler le taux d’inflammation.
Comment savoir si on a un problème au nerf vague ?
Au cours du vieillissement, le tonus vagal a tendance à faiblir (1). C’est ce qui s’observe en étudiant la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC) qui rend compte des intervalles entre deux battements cardiaques. Ces intervalles ne sont pas constants mais, d’une manière générale, une VFC plus élevée est le signe d’un meilleur état de santé général. La VFC diminue avec l’âge, atteignant, chez certaines personnes âgées de plus de 65 ans, des niveaux qui constituent un facteur de risque de mortalité.
Lire : Santé cardiovasculaire : que mesurent les tests médicaux ?
La VFC donne des informations sur le fonctionnement des systèmes nerveux autonomes et donc le tonus vagal. C’est aussi un marqueur qui prédit la morbidité et la mortalité toutes causes.
Les appareils de mesure de la VFC
Il existe actuellement des outils pour mesurer la VFC chez soi. Pour Navaz Habib, « Les plus précis semblent être les ceintures thoraciques, qui enregistrent l’activité électrique du cœur. » Ces dispositifs sont souvent vendus aux sportifs qui veulent contrôler leur rythme cardiaque pendant leur entraînement, comme la ceinture Polar H10. Ces capteurs de fréquence cardiaque sont équipés de dispositifs Bluetooth. Une application séparée est nécessaire pour consulter les données. Pour cela, il existe par exemple l’application Elite-HRV, à installer sur son smartphone. Moins contraignants, les capteurs à porter au poignet (Fitbit, Garmin, bracelets Whoop) enregistrent les pulsations cardiaques en détectant le débit sanguin dans les vaisseaux du poignet « Les montres connectées ne sont pas très précises pour évaluer la VFC, mais ce sont de bons trackers d’activité qui permettent de se faire une idée globale de son état de santé, » ajoute Navaz Habib. Encore plus léger, il y a l’anneau Oura Ring qu’il suffit de mettre au doigt. « J’en possède un depuis cinq ans et j'en suis très satisfait, dit Navaz Habib. S’il mesure de façon assez fiable la VFC et d’autres paramètres lies à l’activité physique, il est surtout intéressant pour les données qu’il collecte durant le sommeil. »
Comment stimuler le nerf vague ?
Dans une situation de stress, le système sympathique est plus sollicité que le parasympathique. Vous pouvez stimuler votre nerf vague grâce à différents exercices. Bonne nouvelle : inutile de prendre un traitement médicamenteux pour activer votre nerf vague, il existe des techniques 100 % naturelles ! La stimulation du nerf vague améliore le fonctionnement du système nerveux autonome.
La stimulation du nerf vague grâce aux exercices de respiration
Dans Activez votre nerf vague, le Dr Navaz Habib donne différents conseils pour stimuler naturellement le nerf vague. Les exercices de respirations, tels que ceux que l'on peut pratiquer dans la cohérence cardiaque mais aussi dans le yoga (pranayama) ou la méditation de pleine conscience, sont des outils pour stimuler le nerf vague. "La façon la plus efficace d’avoir une action positive sur votre nerf vague est d’apprendre à respirer correctement. Une respiration thoracique rapide et superficielle est un signe de stress qui active le système nerveux sympathique, tandis qu’une respiration abdominale, lente et profonde, est un signe de détente qui va activer le nerf vague, " explique Navaz Habib.
Lire : La respiration anti-inflammatoire
Dans Cohérence cardiaque 365, David O'Hare propose de prévoir chaque jour 3 séances de cohérence cardiaque, avec un rythme de 6 respirations par minute, sur une durée de 5 minutes par séance, d'où son résumé en "365". Du point de vue pratique, cela signifie que lors d'une séance de cohérence cardiaque, vous inspirez pendant 5 secondes, puis vous expirez pendant 5 secondes. Pour cela, il est conseillé d'adopter une respiration abdominale, d'inspirer par le nez et d'expirer par la bouche. Vous pouvez vous focaliser sur une intention, par exemple :"Je me fais du bien grâce à la cohérence cardiaque". Pour intégrer le rythme de 6 respirations par minute, vous pouvez vous aider d'une application sur votre smartphone. Il en existe de nombreuses dédiées à la cohérence cardiaque.
La pratique du chant, qui impose des exercices respiratoires, peut également être bénéfique, d'autant plus que le nerf vague est impliqué dans la production des vocalises, puisqu'il innerve les muscles du larynx situés sous les cordes vocales. Ces muscles jouent un rôle important dans la production des sons grâce à la tension et au relâchement des cordes vocales.
Les autres moyens d'activer son nerf vague
Voici d'autres moyens d'activer son nerf vague :
- l'exposition au soleil ;
- les gargarismes ;
- les douches froides ;
- la neurostimulation vagale avec un appareil ;
- l'auriculothérapie, ou acupuncture auriculaire, car le nerf vague contrôle des sensations dans le pavillon de l'oreille...
Il est également important à veiller à bien dormir. "C’est durant le sommeil que le nerf vague effectue l’essentiel de ses fonctions réparatrices, explique Navaz Habib. Un manque de sommeil entraîne un dérèglement du rythme circadien et empêche ainsi le nerf vague de veiller au bon déroulement du processus de récupération de notre corps." Dans son livre, il indique quels gestes quotidiens et hebdomadaires adopter pour stimuler correctement ce nerf et rester en bonne santé.
Pour en savoir plus, lire Activez votre nerf vague du Dr Navaz Habib
Référence
(1) Abhishekh et al. Influence of age and gender on autonomic regulation of heart. J Clin Monit Comput. 2013.