Pour diagnostiquer une ostéoporose ou plus généralement évaluer la solidité des os, les médecins ont recours à un examen rapide et indolore par imagerie : l'ostéodensitométrie. Cet examen permet d'obtenir plusieurs indices dont la densité minérale osseuse considérée comme un reflet fiable du risque de fracture. En réalité, cette mesure doit être prise avec beaucoup de précaution. Thierry Souccar, auteur du Mythe de l'ostéoporose, vous explique pourquoi.
Une mesure partielle
Première chose à savoir : l'ostéodensitométrie ne mesure pas la totalité du tissu osseux, seulement les minéraux. Le collagène, sur lequel reposent les minéraux, est éliminé du calcul.
Le logiciel calcule la quantité de calcium pour chaque région anatomique scannée. Cette quantité de minéraux, qui est donnée en grammes, se nomme contenu minéral osseux (CMO) ou masse minérale osseuse.
Cette masse minérale est divisée par la surface de l’os qui a été scannée. Le résultat est la DMO, exprimée en grammes par centimètre carré (g/cm2).
La DMO est donc une mesure partielle de la quantité de tissu osseux.
La DMO ne donne même pas une mesure fiable de la véritable densité osseuse d’un individu : du fait du principe même qui préside au calcul de la DMO, le résultat peut sous-estimer ou surestimer la DMO réelle de 20 à 50%.
En effet, la DMO calculée par l’appareil se base sur la projection en deux dimensions d’une structure – l’os – qui en a trois. La troisième dimension, la profondeur, n’est pas prise en compte puisqu’elle a la même direction que
le faisceau de photons. La DMO est donc une « densité surfacique » plutôt qu’une densité volumétrique.
Une mesure qui ne dit rien sur le risque de fracture
La DMO représente ainsi une interprétation imparfaite de la structure osseuse et cela explique en partie les limites de l’examen. Ainsi un os fin va donner une DMO plus basse qu’un os large, même si la densité volumétrique est la même. Or, pour la même densité volumétrique un os large est plus résistant qu’un os mince. La DMO ne renseigne donc pas sur la résistance de l’os. On peut donc dire que deux personnes dont la DMO est identique n’ont pas le même risque de fracture.
La DMO ne renseigne pas non plus sur la qualité de l’os. La qualité osseuse englobe plusieurs aspects complexes et mal connus de la composition et de la structure de l’os dont la micro-architecture de l’os trabéculaire et de l’os cortical, le niveau de remodelage osseux, le degré de minéralisation, la composition de la matrice et du minéral, les phénomènes de microfatigue et de propagation des microfissures.
Comment expliquer que plus dense ne signifie pas forcément plus solide ? Dans un os normal, la rigidité vient des minéraux, tandis que la malléabilité vient du collagène. C’est le collagène qui absorbe l’énergie en cas de choc ou de torsion, c’est donc lui qui donne sa résistance à l’os. Donc un os très minéralisé peut être plus fragile, parce qu’il a troqué de la flexibilité et de la friabilité contre de la rigidité: il faut simplement un peu moins d’énergie pour le briser.