Dr Kuhn : «L’entraînement à glycogène bas, c’est plus de flexibilité et moins de troubles digestifs en course»

Dr Kuhn : «L’entraînement à glycogène bas, c’est plus de flexibilité et moins de troubles digestifs en course»

A qui s’adresse Ultra Performance ?

Ce livre a été conçu avant tout pour les sportifs d’endurance, ceux qui ont envie de progresser, d’explorer d’autres voies d’entraînement. Cependant il est profitable et accessible à tout le monde même s’il demande un peu d’organisation au début, et le courage de changer d'habitudes. Souvent les gens ont un peu peur lorsque je leur parle de cette autre manière de s’entraîner. Mais c’est le même principe que pour un jeûne, il suffit de le tester, en ne faisant pas n’importe quoi évidemment, et on se rend compte qu’en réalité il n’y avait pas de raison d’avoir peur. Quand j’ai débuté cet entraînement c’était comme un moyen de changer mes habitudes et d'explorer d'autres voies. C’est toujours agréable de changer ses habitudes non ?
 

Qu’est-ce que l’entraînement à glycogène bas, en quelques mots ?

Ce type d’entraînement est un entraînement en contraintes, c’est-à-dire qu’il permet de profiter d’un déclencheur d’adaptation qui est la baisse du glycogène musculaire. Quand on baisse le glycogène musculaire, on oblige les muscles à s’adapter. Pour amorcer cette baisse, on va utiliser l’effort et côté alimentation, on diminue la consommation de glucides de façon intermittente. Après avoir fait chuter le glycogène grâce à l’effort, on utilise un 2e effort, sans recharge en glucides entretemps, pour booster le régulateur des adaptations. On augmente ainsi le bénéfice de cette adaptation.
 

Pourquoi ne pas s’entraîner simplement avec un régime low carb ?

Les régimes low carb et cétogènes ne sont pas adaptés à tous les sportifs : certains en profitent grandement, mais beaucoup n’en profitent pas, d’où les résultats assez mitigés des études. Ces régimes favorisent l’adaptation musculaire comme l’entraînement à glycogène bas. Mais l’avantage de ce dernier c’est que pour des résultats à peu près similaires, il n’y a pas de réduction de la quantité de glucides au quotidien. Il s’agit de manger des glucides de manière intermittente, ce qui est accessible à plus de personnes. De plus cela donne une meilleure flexibilité d’entraînement et en compétition. En effet, le corps conserve ainsi la faculté d’utiliser les glucides. En course, les troubles digestifs seront ainsi moins moindres que lorsqu’on réintroduit les glucides alors que l'on suit un régime low carb ou cétogène.
 

Doit-on s’entraîner toute l’année à glycogène bas ou existe-t-il des moments plus favorables que d’autres ?

Le moment le plus favorable selon moi lors des deux derniers mois avant une compétition afin d’acquérir une adaptation que l’on conserve jusqu’à la course. Il faut faire environ 3-4 séquences effectuées avant les 2 à 3 dernières semaines qui précèdent la compétition, soit une séquence par semaine. Cependant c’est bien d’avoir déjà testé ce type d’entraînement avant car les premières séances sont assez surprenantes. Pour ma part, il m’a fallu quelques semaines d’adaptation pour passer d’une séance à jeun où j’avais l’impression de ne pas avancer à des séances de plus de 2 h d’entraînement sans problème.
Pour ma part, je l’utilise un peu toute l’année, car c’est l’occasion de changer mais aussi de m’adapter à mon emploi du temps. Par exemple, quand j’ai écrit ce livre, il m’arrivait de sauter le repas de midi après ma séance du matin et avant celle du soir. Je pouvais écrire plus, tout en m’entraînant à glycogène bas.
 

Comment cet entraînement a-t-il impacté vos performances ?

Déjà j’ai découvert que j’étais capable de m’entraîner avec moins de glucides. Du coup, je suis moins dépendant psychologiquement des repas, et quand je dois en sauter un, cela me stresse moins. Pour mes performances en course, c’est difficile à évaluer car j’ai modifié d’autres choses dans ma manière de m’entraîner et parce qu’une course ne se déroule jamais dans les mêmes conditions que la précédente. J’ai battu cette année mon record en Ironman, passant de 10h27 à 10h07.
 

Quels sportifs utilisent aussi cette méthode selon vous ?

Certains sportifs font ce type de séances de manière plus instinctive, je pense à Timothy Olson par exemple, un grand traileur américain. Certaines de ses séances d’entraînement sont à haut glycogène et d’autres à bas glycogène. Et il programme son alimentation en fonction du type de séance qu’il va faire. C’est moins rigoureux, plus intuitif que la méthode que je développe dans Ultra Performance mais cela revient un peu au même. Certains cyclistes de l’équipe de Christopher Froome font de même. Grégory Rouault de l’équipe de France de triathlon a utilisé cette méthode avec satisfaction.

Quels sont les principaux avantages de votre méthode ?

Le principal avantage à mon sens est la flexibilité. On devient capable de brûler beaucoup de lipides mais sans perdre la capacité à utiliser les glucides. Une moindre dépendance aux glucides tout en gardant la faculté à durer, à accélérer facilement en course, plus de polyvalence. Couplée à un entraînement digestif avant une compétition, elle permet de rester capable de consommer des glucides en les tolérant bien. Ainsi, sur mes dernières compétitions je n’ai pas eu du tout de troubles digestifs.
 

Est-elle risquée ? Tout le monde peut l’adopter ?

Notre organisme est bien conçu, ce qui fait qu’il y a peu de risques. Il faut simplement être prudent au début. Lors de sa première séance à glycogène bas, mieux vaut ne pas s’éloigner trop de chez soi et emmener une collation au cas où. Cela peut poser des problèmes si on n’avait pas l’habitude non plus auparavant de s’entraîner deux fois en 24 heures, notamment en course à pied. La clé c’est d’y aller progressivement.
 

Quel est votre avis sur la boisson aux cétones utilisée par certains sportifs ?

L’intérêt du régime cétogène est d’utiliser les cétones comme carburant musculaire à la place des muscles. Apporter directement les cétones pourrait permettre d’épargner le glycogène, la baisse du glycogène à l’effort étant un frein. Des études ont montré qu’une boisson aux cétones pourrait permettre d’améliorer les performances sur de courtes distances. Chris Froome l’utilise d’ailleurs. Cela dit, à environ 2500 euros le litre, quels que soient les bénéfices, c’est vite vu. 
 

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