Chirurgie de l'obésité et carences

Chirurgie de l'obésité et carences

Vous le savez, une grande partie de mon travail consiste à prendre en charge des patients candidats à une chirurgie de l’obésité. Ce sujet me passionne même si au début ce fût difficile à gérer (peu de connaissances théoriques fiables et des a priori, il faut le dire !). Une grande partie de mon parcours professionnel est lié à la prise en charge de patients en surpoids ou obèses, probablement parce que ce type de problématique me touche personnellement ; venir en aide à ces personnes était une évidence, avec les joies et les difficultés que cela implique parfois.

Cette fois, j’aimerais faire le point sur les carences qui peuvent apparaître suite à ce type d’opération. Ce sujet est bien évidement abordé dans notre ouvrage « Le guide de la chirurgie de l’obésité » aux Editions Thierry Souccar mais je souhaite apporter quelques informations complémentaires récentes.

Tout d’abord, selon les recommandations de l’HAS (Haute Autorité de Santé), il y a des dosages obligatoires à effectuer en préopératoires et qui doivent être poursuivis tous les 6 mois en postopératoire : albumine (marqueur du statut en protéines), hémoglobine (pigment qui sert à transporter l’oxygène grâce au fer, dans les globules rouges), ferritine et coefficient de saturation de la transferrine (réserves de fer dans l’organisme : carence = anémie ferriprive), calcium, vitamine D, vitamine B1, vitamine B9 et B12 (dont la carence peut entraîner une anémie connue sous le nom de Biermer). On peut aussi doser la vitamine B6, la pré-albumine (marqueur des protéines encore) et la vitamine B9 érythrocytaire (c'est-à-dire contenue dans les  globules rouges).

Pourquoi les patients peuvent –ils être carencés ? Plusieurs pistes sont possibles :

-Les apports alimentaires étant diminués volontairement par la chirurgie (aussi bien sleeve que by-pass), les besoins nutritionnels ne sont plus couverts et des « manques » peuvent apparaître.

-La tolérance alimentaire étant complètement bouleversée pour certains, des aliments ou familles d’aliments sont évincés (viande rouge, laitages, féculents). Nous n’avons, à ce jour, pas d’explication franche concernant ces changements. Ils sont liés à la chirurgie, probablement parce qu’elle modifie radicalement la communication hormonale qui existe entre le tube digestif et le cerveau, remaniant les goûts, les envies et le comportement alimentaire.

-En fonction de la technique, il peut y avoir plus ou moins de carences. On sait que le risque le plus important concerne le by-pass car elles apparaissent très tôt. D’où l’obligation de supplémentation dès la première semaine postopératoire ! Pour l’anneau et la sleeve, les carences peuvent apparaitre après 6 mois en général.

-Enfin, la compliance des patients joue un rôle non négligeable. La surveillance et la prise quotidienne des suppléments représentent une contrainte psychologique et financière dont il faut tenir compte avant la chirurgie. Eduquer les patients à se prendre en charge vis-à-vis de ce point-là est essentiel et nous nous y efforçons au quotidien.

Il faut aussi faire la différence entre le déficit (manque qui n’entraine pas de pathologie vraie) et les carences (manques qui entrainent systématiquement une maladie spécifique avec des symptomes, comme les anémies). Les déficits sont plus fréquents et se corrigent relativement bien. Lorsque les carences sont présentes, elles sont plus complexes à traiter et nécessitent du temps. Si les déficits sont traqués et corrigés, pas de risques de carences ! D’où l’importance, encore une fois, d’être suivi ! Je ne le dirai jamais assez !

Faisons à présent le point par rapport aux vitamines et minéraux énoncés plus haut.

Le risque d’être carencé en protéines est assez faible globalement, quelle que soit la chirurgie. Si les apports sont maintenus le plus possible, il n’y a pas de problèmes. Les patients ont souvent des taux limites mais cela reste correct. D’où l’importance de bien consommer des protéines tout au long de la journée (lait ou laitages ou fromage en collation et en dessert et viande/poisson/œuf le midi et le soir). Il est également possible de rajouter de la poudre de lait dans les préparations lactées (2 à 4 c à s par jour environ) si cela est bien toléré. Dans certains cas extrêmes où le patient peut rencontrer de très grosses difficultés à consommer des protéines, le diététicien ou l’endocrinologue peut être amené à conseiller de la poudre de protéines achetée en pharmacie (non remboursée dans ce cas précis) et à utiliser avec précaution.

Pour le fer, la vitamine B12, le calcium et la vitamine D, le by-pass arrive en tête des carences. Cette technique de restriction absorptive crée forcement des manques graves. La complémentation orale obligatoire à vie (où au moins les 2 à 3 premières années) est là pour y pallier. Si elle est insuffisante, la forme intraveineuse peut être requise momentanément. Cependant, la carence en fer entrainant une anémie est aussi fréquente pour les patients « sleevés » et  « annautés », surtout s’ils y sont prédisposés avant l’opération.

La carence en vitamine B9 est aussi très importante pour les femmes opérées, en âge de tomber enceinte. En effet, celle-ci est primordiale en cas de grossesse. Elle permet la construction harmonieuse du système nerveux du futur bébé. Si elle vient à manquer, des malformations graves peuvent être constatées. Les femmes souhaitant mener une grossesse après la chirurgie (toujours avec un délai de 12 à 18 mois) doivent être conscientes qu’elles auront un suivi vitaminique plus poussé et régulier pendant ces 9 mois, voire même pendant la phase de conception, pour éviter tout problème.

Dans le but de palier au mieux ces insuffisances, un laboratoire néerlandais, FitForMe, a mis au point, après étude contrôlée sur 36 mois auprès de 150 patients, des compléments vitaminiques spécifiques des chirurgies bariatrique. Ce laboratoire est en cours d’implantation en France et j’ai été démarché en vue d’une présentation de la gamme. Je dois dire que j’ai été plutôt convaincue par leurs produits : un spécifique des by-pass (WLS Forte®) et un spécifique des sleeves et anneaux (WLS Optimum®), plus un complément en calcium et vitamine D (Calcium plus®) si besoin. Plus besoin de prendre plusieurs gélules ou comprimés, tout est compris en une seule, avec un apport garanti qui couvre les besoins, largement augmentés suite à ces opérations.

Voici le lien vers le site internet du laboratoire :https://www.fitforme.fr/

Vous pourrez également commander un kit d’essai gratuit et ainsi vous faire une idée de la qualité du produit. Côté coût, il est environ de de 30 à 40€ pour 90 gélules soit 3 mois de traitement. Il me semble que cela reste très correct, vu qu’une partie des suppléments prescrits habituellement ne sont pas remboursés par la SS et que les pharmacies pratiquent aussi les prix qu’elles souhaitent !

Un dernier point sur le lien entre carences et perte de cheveux. Ce problème est très fréquent, surtout chez les femmes qui voient leur chevelure tomber par poignées, environ 3 à 6 mois après la chirurgie. Il y a bien un facteur de carence possible (on peut prendre une supplémentation spécifique  riche en cystéine et vitamine B6, voire en antioxydants) mais également un facteur hormonal énorme. Si vous avez déjà été enceinte ou si une femme de votre entourage l’a été, vous avez déjà vu cela ! Les hormones changeant complètement après la grossesse (elles chutent vertigineusement), les cheveux tombent aussi ! Parlez-en avec votre endocrinologue qui pourra vous conseiller au mieux une complémentation adaptée. Idem pour la peau qui devient sèche : soin externes et supplémentation sont vos meilleurs alliés !

Maintenant que vous savez tout sur la supplémentation, à vous de jouer pour être en bonne santé !

Auteur

Élodie Sentenac

Docteur
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