Course à pied, sprint, crossfit, discipline de saut, tennis, toutes ces disciplines ont un point commun : elles peuvent toutes générer des périostites tibiales. Le terme « périostite tibiale » désigne toutes sortes de douleurs inflammatoires aiguës le long du bord interne du tibia. Contrairement à la fracture de fatigue qui est douloureuse en un point précis, la zone de douleur de la périostite est diffuse ; elle se situe sur plusieurs centimètres le long du tibia (en général devant le tibia). S’en débarrasser peut devenir un rapide casse-tête pour ceux et celles qui en souffrent. Dans cet article je vous propose des solutions.
Course à pied, perte de graisse et périostite
Avec les beaux jours de nombreux coureurs augmentent la durée, l’intensité et le nombre des séances de course dans la semaine pour devenir plus performants ou pour maigrir et perdre de la graisse. Pour autant les stratégies de récupération comme les automassages, les étirements, les mobilisations de la cheville, le port de chaussettes de contention et le renforcement musculaire des muscles de la hanche et du pied sont sous-estimés ou carrément absents du programme d’entrainement. Le coureur et la coureuse qui courent pour être plus performants pensent souvent que ces stratégies de récupération ne sont pas très importantes pour leur progression. Les personnes qui courent pour perdre de la graisse et maigrir cumulent en plus d’autres désavantages comme le fait de ne pas connaître ces stratégies de récupération. Ils sont la plupart du temps sous entrainés voire sédentaires et la course à pied n’est absolument pas l’activité la mieux adaptée à leur objectif de perte de poids et de fonte des graisses, tout simplement car elle représente un stress énorme pour les muscles, les tendons et les articulations. De plus la graisse excédentaire peut représenter plusieurs kilos de poids mort qui rajoute une onde de choc phénoménale à cause de l’accélération du corps lors de la course. Par exemple, lors de chaque foulée, un homme de 75 kilos supportera lors de chaque appui 300 kilos par jambe si il court à un rythme soutenu. Lors d’exercice de saut comme on le pratique souvent dans la discipline en vogue du Crossfit, chaque jambe supportera prêt de 1125 kilos lors de la réception.
Vous comprendrez mieux pourquoi d’une part chaque kilo de graisse excédentaire peut rapidement devenir problématique et générer des blessures tendineuses ou des périostites et surtout pourquoi je déconseille la course à pied dans les premières semaines d’un programme de perte de graisse. A la place je vous suggère un programme d’entrainement comme je le suggère dans cet article sur la perte de graisse ou l’utilisation de séance « run and bike » : courir et faire du vélo en alternance afin de minimiser l’onde de choc encaissée par chaque jambe.
Le pied : supination ou pronation
Les personnes ayant les pieds plats (pronation excessive) ou qui marchent sur les bords externes du pied (supination excessive) ont tendance à avoir une faible capacité d'absorption du choc associée à toutes les actions de course et de sauts, ce qui augmente l’onde choc qui transite par le tibia via les muscles qui s’insèrent dessus (jambier postérieur, long fléchisseur commune des orteils, muscle soléaire). Par exemple avec le pied en pronation (effondrement du pied de façon interne lors de chaque appui au sol), il résulte une contraction excentrique (muscles étiré et contracté en même temps) du soléaire, du jambier postérieur et du long fléchisseur commun des orteils pour ralentir l’écrasement excessif du pied. Avec des volumes de course ou de saut de plus en plus élevés (et de plus en plus de fatigue) ou augmentés rapidement (lire cet article sur le principe de progressivité) la capacité d'absorption des chocs diminue. Cela crée aussi un problème pour les muscles opposés (antagonistes) à ceux cité au dessus, ces muscles devant travailler sur une plus grande distance.
Ainsi mes premiers conseils pour les douleurs de tibia, sont de réduire un peu le volume de course, de rester sur des surfaces douces, et surtout d’augmenter de façon très progressive le temps de course ou le nombre d’impact au sol par entrainement. Respecter la règle des 10 % : pas plus de 10 % d’augmentation par semaine. Les séances « Run and bike » citées plus haut sont également à utiliser.
C'est également une bonne idée de passer un peu de temps pieds nus. Le pied est la connexion de votre corps à la terre, et il est important qu'il soit en mesure de bien fonctionner pour une santé totale. Je ne vous suggère pas de courir pieds nus ou en chaussures minimalistes dès le départ, mais le travail dynamique de mobilité ou les exercices de renforcement que je vais décrire plus bas peuvent être fait pieds nus.
Je vous conseille en plus de travailler votre pied « à temps perdu ». Imaginez que vous avez une sorte de trépied à la base de votre pied, où un point se trouve sous la partie charnue en-dessous du gros orteil, l'autre est sous la partie charnue en-dessous du petit orteil, et la dernière partie est au début du creux vers le milieu du talon. Ce triangle encadre la voûte plantaire, et les exercices suivant vous donneront les meilleures chances de profiter de l'effet « amortisseur » inhérent à la structure du pied. Il vous donnera le maximum de chances d'avoir une base solide pour construire un pied vigoureux en position debout, et pour vous donner le meilleur équilibre afin de ne pas tomber.
Assis ou debout, essayez de contracter les muscles du pied pour rapprocher ces trois points, mais si possible sans recourber les orteils. Une fois que vous sentez la tension du pied se resserrer, vous remarquerez probablement que la position du pied a changé et que vous avez creusé une voûte plantaire plus haute à l'intérieur du pied.
Vous pouvez également ressentir une certaine tension musculaire, en profondeur dans le mollet et le dessous du pied, mais aussi de part et d'autre de la cheville. Envisagez de faire une série d'abord en isométrie, puis en évoluant progressivement vers des exercices en résistance comme « la marche des orteils ».
Essayez de tenir cette position ramassée du pied tout en faisant un simple exercice comme des squats au poids du corps ou des fentes, vous remarquerez une grande différence dans la façon dont vos hanches et vos genoux se sentent et se déplacent. Voir la vidéo de cet article.
Cheville : l’importance d’une bonne mobilité
La cheville est une articulation qui est conçue pour être mobile, la position assise, d’anciennes entorses mal rééduquées et le stress répétitif imposé par l’entrainement contribuent à une faible mobilité sur les deux plans - presque toujours dans le plan transversal, mais également assez fréquemment dans le plan sagittal. De ce fait, il est important d'utiliser des mobilisations actives de la cheville pour aider le système nerveux à gérer de nouvelles gammes de mouvements. Un exercice de mobilité de la cheville inclue des « avancées de genoux» vers l’avant, comme vous le découvrirez dans la vidéo de cet article.
Ces types d’exercices de mobilisation sont encore plus efficaces avec l’aide de bandes élastiques. L’une en décompression articulaire et l’autre en compression tissulaire (muscles et fascias). La première agira comme une forme d’auto-ostéopathie très douce au niveau de la cheville alors que la seconde favorisera d’une part un étirement profond des tissus et en même temps un drainage de tous les muscles autour du tibia.
L’équilibre des forces musculaires autour du tibia et de la cheville
La grande majorité du temps, on constate que les mollets et le soléaire (muscle à l’arrière du tibia) sont beaucoup plus forts, puissants et endurants, que le jambier antérieur (muscle devant le tibia). Pour cette raison, il est important de renforcer la partie antérieure avec des exercices en flexion dorsale (ramener le pied vers le tibia). Le point de départ partira d'exercices comme les flexions dorsales avec bandes, en progressant avec les flexions dorsales avec bandes et automassages opposés, puis vers des exercices en résistance à la gravité debout.
En moyenne 3 ou 4 séries de 20 répétitions avec une bande rouge seront suffisantes en augmentant progressivement la tension de la bande (violette) tout en diminuant le nombre de répétitions (10 au lieu de 20). Ce type de programme sera exécuté 3 fois par semaine.
Des automassages pour la qualité des tissus:
Généralement, en cas de douleur au tibia (périostite ou tendinopathie), on observe une qualité des tissus insuffisante, c’est à dire avec un trop grand nombre de tensions et nœuds musculaires ou de trigger points, de sorte qu'il vous incombe de passer régulièrement le rouleau de massage et la balle de tennis sur les péroniers, mollets, soléaires et jambiers antérieurs, ainsi que la surface plantaire du pied. Il arrive souvent que ce travail libère beaucoup de choses et mène très loin dans l'amélioration du fonctionnement et la réduction de la douleur du tibia mais toutes le douleurs distantes dans le reste du corps, car ce dernier fonctionne en chaine musculaire. Toute restriction ou douleur d’une zone du corps à des répercussions sur le reste du corps à cause des compensations que nous mettons en place.
Des douleurs qui peuvent venir d’ailleurs
Comme je viens de le rappeler, Il est également important de garder à l'esprit que l'orientation du pied peut être déviée du fait de tissus trop ou pas assez actifs dans le reste du corps via les chaines musculaires. Le tenseur du fascia lata (TFL) qui est un muscle légèrement sur la partie latérale avant de votre hanche et le biceps fémoral (un des muscles à l’arrière de la cuisse) peuvent faire tourner à l'extérieur votre tibia. Si les muscles fessiers sont inhibés (ils ne fonctionnent pas bien), la rotation interne des fémurs peut se traduire par une rotation externe de compensation du tibia. Comme le TFL est généralement hyperactif chez les coureurs et de nombreux sportifs en raison d’un muscle psoas qui ne fonctionne pas bien, c'est une bonne idée de prendre le temps de le masser avec une balle de tennis pour le relaxer, tout en activant la partie postérieure du moyen et du grand fessier. Ainsi des périostites ou des tendinopathies du tendon d’achille ou de la voute plantaire peuvent guérir beaucoup plus rapidement car vous aurez agi sur les causes de votre problème. (Voir Coffret CTS)
Le programme en résumé pour éviter les douleurs au tibia
Bien s’échauffer avant de courir même pour un simple footing. Vous pouvez commencer par effectuer 1 série de 10 répétitions ou secondes de chaque exercice proposés.
En cas de douleur au périoste ou aux tendons : stoppez la course et utilisez des activités de substitution (Total rope training, gainage autour de l’abdomen et du bassin, musculation avec bandes élastiques ou au poids de corps)
Terminez toutes vos séances de course par des automassages prioritairement des muscles de la voute plantaire, mollets et jambiers antérieurs. Rajoutez en fonction de votre temps des automassages autour des hanches ainsi que des mobilisations articulaires avec bandes et ou quelques étirements globaux.
Portez des chaussettes de contention.
Utiliser des mobilisations articulaires avec bandes et compressions tissulaires.
Les jours sans course ou sans entrainement, profitez-en pour renforcer le jambier avec bande élastique.
Ce qu'il faut retenir
Lorsqu'une douleur au tibia ou aux tendons de la jambe se présente, il faut l'évaluer et la corriger sous de multiples angles : améliorer la mobilité et la qualité des tissus, la force agoniste/antagoniste et le contrôle autour des articulations. Ce travail local doit être un peu plus appuyé en de telles circonstances, mais pour la prévention à long terme, il est préférable de travailler en intégralité, avec un programme d'entrainement global qui optimise le fonctionnement de l'ensemble des chaînes musculaires.
C’est ce que propose mon coffret CTS santé performance et esthétisme
Christophe Carrio