Dans son livre Hyperactivité la solution magnésium, la pédiatre nîmoise Marianne Mousain-Bosc détaille des résultats spectaculaires obtenus grâce à la supplémentation en magnésium chez des enfants présentant des troubles du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité – les TDA/H qui concerneraient 3 à 5% des enfants.
Vous avez publié fin 2014 une édition augmentée de votre livre paru quatre ans plus tôt, pourquoi ?
Cette édition m’a été demandée par des Néerlandais après une conférence après une conférence aux Pays-Bas et ce, avec l’ajout d’un nouveau chapitre : « Magnésium et grossesse ». Et puis il y a une mise à jour sur les médicaments qui sont utilisés dans le traitement de l’hyperactivité, c’est-à-dire le méthylphénidate (Ritaline surtout mais aussi Concerta ou Quasym, NDLR). Dans la mesure où, juste après le scandale du Médiator, le méthylphénidate a été placé dans la catégorie des médicaments sous surveillance renforcée nécessitant une réévaluation très rapide, j’ai été appelée à présenter les effets secondaires de la Ritaline, du Concerta et du Quasym en septembre 2011 à l’Agence du médicament. Un an après, les trois laboratoires ont écrit une lettre de recommandation spécifiant que le méthylphénidate était un stupéfiant avec des contre-indications importantes. Les complications sont d’ordre cardiovasculaires et surtout neuropsychiatriques : dépression, anorexie, hallucinations.
Vous préconisez le magnésium pour les TDA/H en première intention. Mais fondamentalement, pourquoi pas, en cas d’échec, avoir recours à la Ritaline par la suite, toutes précautions prises ?
Le problème c’est que le méthylphénidate va traiter un symptôme mais pas la cause de la maladie, tout le monde le sait. Il faut rechercher la cause des TDA/H et elle est liée à une anomalie du métabolisme du magnésium qui est génétique, familiales. Si au bout de 3 à 6 mois de supplémentation, le magnésium n’a aucune efficacité alors le méthylphénidate sera peut-être utile ou indispensable. Mais en première intention, il faut faire le traitement de la cause. Pour toute maladie, il est indispensable de chercher s’il y a une origine métabolique toute simple, comme le trouble familial du métabolisme du magnésium. Ces troubles sont décrits depuis 2002 par des équipes aux Pays-Bas. Il est grand temps que ce travail puisse être franchement écouté. Dans mon expérience en tout cas, je n’ai eu aucune famille qui, en seconde intention, a eu recours à la Ritaline.
Mais il est fait largement état de résultats très spectaculaires de la Ritaline, de nombreuses familles en témoignent…
Les effets immédiats sont spectaculaires et très rapides. De nombreux médecins savent qu’il y a des effets secondaires mais disent qu’ils ne sont pas décrits à long terme. C’est faux. En 2010, la Food and Drug Administration a publié un document sur la violence, l’agressivité, les effets secondaires à long terme du traitement par méthylphénidate. L’Agence du médicament a pris connaissance de cette publication et a inclus le méthylphénidate en janvier 2011 dans le bloc des médicaments sous surveillance prolongée. L’utilisation d’un médicament étiqueté stupéfiant avec des effets secondaires à long terme chez un enfant qui est en pleine phase de maturation cérébrale est-elle raisonnable ? En 2011, on m’a demandé de participer au premier livre scientifique mondial sur le magnésium, édité par l’université d’Adélaïde en Australie, il est la reconnaissance de nos travaux à Nîmes et à Montpellier.
Comment se fait-il que le corps médical soit encore très mesuré sur les effets du magnésium et que les parents se trouvent démunis quand ils souhaitent cette supplémentation et ne savent pas comment la doser ?
Mes amis médecins ont de la difficulté à me croire. Parce que je suis maintenant à la retraite peut-être et parce que le magnésium avait été oublié. Il y a une réticence du corps médical, une difficulté à se former et une difficulté de communication. Je me bats pour toutes ces familles qui savent que le méthylphénidate a des effets secondaires et parce que leur parcours pour trouver une thérapeutique est trop difficile.
La Haute Autorité de santé (HAS) vient de publier ses premières recommandations sur les TDA/H en direction des généralistes et des pédiatres. Pourquoi seulement maintenant ?
Jusqu’à maintenant, l’hyperactivité c’était la prescription de méthylphénidate. À l’heure actuelle, la HAS a demandé à ce qu’en première intention l’enfant puisse bénéficier de thérapies comportementales. Ces traitements ne sont pas remboursés, le personnel n’est pas formé et il y a une liste d’attente très importante. Et puis l’efficacité attend plusieurs mois et, selon moi, ces traitements ne corrigeront jamais le trouble biologique sous-jacent, de carence en magnésium, ce qui est pourtant indispensable.
Propos recueillis par Richard Bourdes et publiés initialement dans le Midi Libre du jeudi 5 mars 2015.