Quel est votre parcours ?
J’ai toujours été fasciné par le corps humain, ses performances mentales, physiques, son potentiel d’adaptation, de guérison. Depuis que je suis tout jeune je me passionne pour tout ce qui concerne la performance humaine au sens large. Mais je suis vite rendu compte dans mon parcours sportif qu’on ne pouvait pas dépasser les limites (du moment) inopinément. Le corps vous le fait payer très cher tôt ou tard. Le paradoxe que j’observais autour de moi c’est que le sport auréolé de toutes les vertus bénéfiques pour le corps et l’esprit n’était pas si bon que ça ! 90 % des sportifs vous confieront qu’ils ou elles traînent des petites douleurs ou les séquelles d’un traumatisme.
Et vous, vous êtes-vous blessé ?
Oui. Jusqu’en 2002 « aucun problème majeur » à part les inflammations à répétitions ou les raideurs matinales usuelles de beaucoup de gens. Jusque-là je pensais que tout cela était « normal ». Je demandais tellement à mon corps pour mes entraînements, mes compétitions, les voyages, les shows… que ces petites douleurs et raideurs étaient normales. Je pensais être chanceux lorsque je discutais avec d’autres sportifs de haut niveau ou avec des sportifs amateurs qui ne disposent pas forcément de l’encadrement que j’avais. Et en septembre 2002, c’est la catastrophe, rupture totale du mollet (les deux faisceaux des jumeaux). Les spectateurs assis à 50 m de là ont même entendu le bruit ! Puis les problèmes commencent. Mal orienté, je ne suis pas opéré. Mon corps fabrique un hématome qui s’enkyste empêchant les tissus de cicatriser. Six mois plus tard encore boiteux, je pars aux Etats-Unis pour m’occuper de la préparation physique de différents sportifs de haut niveau. J’y découvre surtout les médecins de l’Académie de médecine sportive américaine. Ils m’ouvriront les yeux sur une vision globale de la médecine traumatologique. Pourquoi le corps se blesse-t-il à un certain endroit ? N’est-ce pas la conséquence de multiples compensations ? Plus j’apprenais et cherchais de mon côté et plus je découvrais que mon propre corps était rempli de compensations. Il avait appris pendant des années à éviter la douleur et compenser. Mais fondamentalement le corps n’est pas fait pour compenser alors un jour ou l’autre il « craque », ou il « disjoncte » ou il tombe malade.
À qui s’adresse Un corps sans douleur ?
C’est d’abord un guide pratique qui apporte des solutions concrètes aux lecteurs qui souffrent et ceux qui souhaitent éviter de souffrir un jour ou l’autre. Que l’on soit sportif ou non, notre espérance de vie s’allonge grâce au progrès sanitaire, à la nutrition, mais en même temps la sédentarité prend de l’ampleur. Et plus on vieillit plus les traumatismes que l’on a fait subir au corps ou que l’on a subi, émergent. Passer 10 h par jour assis confortablement, au bureau, en voiture, chez soi n’est pas bon pour le corps. La position assise provoque des dérèglements posturaux dont les répercutions importantes ne se ressentiront que bien des années plus tard. Le manque d’échauffement de nombreux sportifs provoque aussi des microlésions surtout si le corps utilise déjà des compensations corporelles, ce qui nous ramène aux dix heures que nous passons assis et aux dérèglements entre les différentes chaînes musculaires du corps !
Quelles sont les solutions ?
De très nombreuses méthodes sont recensées dans le livre comme pratiquer des automassages pour lever les tensions profondes, car si on ne fait qu’étirer les muscles on favorise de façon schématique les nœuds musculaires présents en les resserrant. Faire des exercices pour rééquilibrer sa posture puis renforcer de façon équilibrée et spécifique les chaînes musculaires profondes et superficielles. Ce qui est important c’est de faire quelque chose, mais quelque chose de cohérent pour ne pas créer plus de dégâts.
C’est là qu’intervient le principe des types posturaux ?
Oui. Chacun, depuis l’enfance, développe par ses caractères génétiques, son mode de vie, les traumatismes qu’il a subi, une posture caractéristique et des compensations musculaires et articulaires plus ou moins importantes. Or il existe une posture « parfaite » d’un point de morphologique. Dès qu’on s’en éloigne, ce qui est le cas de la plupart d’entre nous, le corps compense et s’use plus rapidement. C’est un peu comme une voiture avec le train avant voilé. On peut toujours conduire, même à grande vitesse, mais on use les pneus et les roulements beaucoup plus rapidement. Sans compter, pour les sportifs, un risque accru de blessure.
J’ai ainsi recensé 5 types posturaux les plus communs. Le livre propose des programmes pour chaque type de posture.
Que se passe-t-il si deux personnes avec des types posturaux différents adoptent un même programme ?
L’une d’elles ira mieux ; pour l’autre, les problèmes commenceront ou s’accentueront. En revanche, il y a de petits exercices faciles et communs à tous les types posturaux, pour décompresser la colonne vertébrale, ou aider au repositionnement du bassin et des épaules dans la journée, au travail par exemple. Favoriser un meilleur alignement du corps de façon régulière dans la journée, tous les jours, c’est déjà agir sur sa posture.
Le programme détaillé dans ce livre repose-t-il sur des bases scientifiques ?
Bien sûr. J’ai intégré les travaux de spécialiste de la colonne vertébrale comme le professeur Stuart McGill qui est une sommité dans le domaine, les travaux sur la douleur et les trigger points menés par le docteur Janet G. Travell qui soigna le président John Kennedy de ses problèmes de dos, les travaux du professeur Vladimir Janda ou encore Shirley Sahrmann. J’ai aussi lu les approches de Mézière, de Feldenkrais. Finalement, ma méthode est une synthèse de toutes ces approches. J’ai essayé d’en tirer le meilleur à chaque fois. De façon globale, je suis un peu comme Saint Thomas, je crois ce que je vois. Et après avoir retrouvé un corps sans douleur, performant, avoir aidé beaucoup de personnes à obtenir des résultats similaires aux miens, ce livre devenait pour moi indispensable. Non pas que les autres approches ne marchent pas, mais au moins je sais que la mienne a fonctionné sur moi et sur énormément de personnes. La méthode décrite dans le livre convient à toute personne voulant se prendre en charge et adopter une hygiène corporelle au quotidien.
Combien de temps faut-il consacrer chaque jour à ces exercices ?
Chaque programme prend environ 20 minutes par jour dans la version globale, mais on peut toujours effectuer une version courte les jours où on n’a pas le temps.
Il y a aussi un chapitre sur la nutrition. Y a-t-il un régime anti-douleur ?
Absolument. Un déficit en magnésium par exemple provoque une augmentation du tonus musculaire, ce qui, à la longue, peut provoquer des tensions musculaires qui se surajoutent à celle déjà présente à cause de notre posture assise ou d’une pratique du sport mal conduite. Le sport aussi entraîne souvent des déficits magnésiens. Le déséquilibre entre les graisses des familles oméga-6 et oméga-3 est responsable d’un état inflammatoire qui peut se manifester sur le système musculo-articulaire par exemple. L’acidification de l’organisme par l’alimentation diminue les capacités de contractions et de relâchement des muscles ce qui peut en retour avoir un effet la création de tension. Bref, beaucoup de choses sont liées. Les épices comme le gingembre et le curcuma représentent aussi des alternatives aux anti-inflammatoires. Bref, un chapitre s’imposait dans un livre traitant d’un corps sans douleur.
Que conseiller à une personne qui souhaite se maintenir en forme en faisant du sport ou une activité physique ?
Tout dépend de son niveau de forme, de son état de santé, de sa posture. Je commencerais donc à lui faire adopter un programme correctif spécifique en fonction de son type postural, après quelques semaines j’intégrerais 2 séances par semaine de renforcement musculaire fonctionnel qui diffère de l’approche que l’on trouve dans beaucoup de salles de sport. Le but étant de renforcer des mouvements globaux du corps, qu’on appelle des schémas moteurs et d’accroître la puissance et la masse musculaire, avant qu’elles ne déclinent avec l’âge. L’esthétisme corporel qui résulte d’un tel programme n’est ainsi pas l’objectif prioritaire, même si c’est ce que beaucoup recherchent en priorité. J’ajouterais 2 séances de travail cardiovasculaire par semaine en fonction de l’état du métabolisme hormonal de la personne. En effet si un individu possède un taux de cortisol trop important, et pas assez de testostérone ou de DHEA comme c’est souvent les cas après 40 ans, alors rajouter des exercices cardiovasculaires comme la course à pied ou le vélo constitue un vecteur de déséquilibre hormonal supplémentaire. Beaucoup de femmes par exemple qui ont suivi de nombreux régimes ont un métabolisme complètement perturbé et ralenti. Rajouter un travail cardiovasculaire dans ces conditions permet dans les premières semaines de perdre du poids, mais, après quelques semaines le métabolisme devient encore plus économe, ce qui est le contraire de l’objectif recherché.