La cuisson peut entraîner la fuite ou la destruction des nutriments. Mais tous ces composés ne se « volatilisent » pas. Ils se transforment en composés antinutritionnels voire toxiques pour notre organisme. Ces composés sont présents dans les produits que nous achetons, leur formation se produisant lors des process industriels par l’application de températures supérieures à 200 °C (céréales, biscuits, café). De la même manière, lorsque nous cuisinons à la maison, nous fabriquons également ces composés, les températures de cuisson pouvant atteindre 250 °C à 300 °C.
La réaction de Maillard
D’une façon générale, ces composés se forment lors d’une élévation de la température à la surface de l’aliment dans un contexte permettant l’évaporation de l’eau : cuisson au four, à la poêle, au barbecue, en friture. Les aliments grillés développent un brunissement caractéristique dû à la formation de molécules aromatiques : c’est la réaction de Maillard qui correspond initialement à la réaction entre un sucre (fonction carbonyle) sur un acide aminé (constituant des protéines). Désormais, le concept de la réaction est élargi et on considère que la réaction entre les produits de dégradation oxydative de la vitamine C ou des lipides insaturés avec une protéine fait partie de la réaction de Maillard.
Des arômes oui mais...
La réaction permet la formation d’arômes très recherchés par les cuisiniers mais l’exposition des aliments à des températures aussi élevées entraîne également la dégradation de nombreux nutriments comme les vitamines, les acides aminés, les sucres, les acides gras essentiels, etc. Les produits de dégradation réagissent alors entre eux et génèrent de nombreux composés appelés AGE (Advanced Glycated End Products) dont certains posent des problèmes de sécurité alimentaire du fait de leur cancérogénicité ou de leur activité biologique pro-oxydante et inflammatoire. Les AGE que nous ingérons sont absorbés par notre organisme et sont notamment responsables d’une accélération du vieillissement et d’une augmentation du risque de maladies chroniques comme le diabète. Il est désormais évident que la façon dont nous préparons nos aliments est en totale corrélation avec la formation de ces composés. Ainsi, frire, griller ou rôtir les aliments sont des modes de cuisson particulièrement générateurs de produits avancés de Maillard.
À noter toutefois : notre corps fabrique lui-même des AGE lorsque les conditions sont favorables : sucre sanguin, pH, température. C’est la réaction entre le sucre et les protéines, les lipides et l’ADN qui est responsable de la formation de ces composés. Chez des malades diabétiques ou insuffisants rénaux, le taux d’AGE sanguins est plus élevé soit en raison d’un taux de glucose plus important, soit en raison d’une mauvaise élimination notamment dans le cas d’une insuffisance rénale. Les AGE déclenchent alors des réactions génératrices de radicaux libres et d’inflammations qui accélèrent le développement de nombreuses pathologies comme l’athérosclérose, l’arthrose, les neurodégénérescences…
Les produits de Maillard que nous ingérons vont rejoindre les AGE fabriqués par notre corps et favorisent la mise en place des processus dégénératifs. Or, nos changements d’habitudes alimentaires ainsi que la consommation d’aliments transformés à bas prix ont conduit à une augmentation de la consommation d’aliments riches en produits de Maillard.
Objectif : moins d'AGE
Si nous ne pouvons pas vraiment agir sur la formation d’AGE in vivo, nous pouvons limiter la quantité d’AGE formés lors des cuissons ménagères afin que notre alimentation ne devienne pas une source de contamination importante en AGE. En effet, nous savons que la formation de ces composés dépend de la température et de la durée de la cuisson ainsi que de la teneur en eau du milieu. Pour certaines personnes, notamment les insuffisants rénaux, diminuer la quantité d’AGE ingérés via l’alimentation revêt une importance toute particulière quand on sait que les AGE seraient responsables de maladies cardiovasculaires au sein de cette population.
L’hypothèse selon laquelle ces composés pourraient être à l’origine d’un certain nombre de maladies et notamment de certains cancers a conduit de nombreuses équipes de scientifiques à s’intéresser de plus près à ces molécules.