Veille de compétition: pasta-party ou pas ?

Veille de compétition: pasta-party ou pas ?

Les derniers repas avant une compétition préoccupent beaucoup d’entre nous qui participons à de longues épreuves d’endurance. Comment optimiser ses performances en endurance sans compromettre sa santé et sans perturber son tube digestif ? Comment trouver le bon compromis ?

Lors des derniers jours avant une compétition d'endurance (triathlon, marathon, trail…) le régime hyperglucidique permet de faire le plain de glycogène pour l'effort. Pour cela, les pâtes sont, encore dans l'esprit de beaucoup de sportifs, LA solution et que ce soit en collectivité (avec la pasta-party) ou en plus petit comité beaucoup mangent de grandes quantités de pâtes accompagnées de sauces parfois mal choisies voire douteuses.

Tout d’abord, comme nous le précisons dans notre livre « Nutrition de l’endurance », mieux vaut éviter de manger trop la veille d’une compétition. De plus, lors de la pasta-party vous risqueriez d’accumuler de la fatigue inutilement en attendant souvent longuement et parfois debout. Vous avez mieux à faire à ce moment, d’autant plus qu’en programmant bien votre dernière semaine (entraînement et alimentation) vos réserves glycogéniques seront déjà faites avant la veille de la course et vous n’aurez pas besoin de manger à outrance (et nous vous le déconseillons même). D’ailleurs, certains organisateurs l’ont compris et positionnent dorénavant la pasta-party l’avant-veille de la course. C’est une excellente idée permettant un moment de convivialité sans créer de fatigue excessive. Si vous ne participez pas à la pasta-party finissez votre régime hyperglucidique l'avant-veille de la course, vous serez tout aussi performant. Mais le problème du choix des aliments demeure… Que penser du choix des pâtes lors des derniers repas ?

Un index glycémique pas toujours le plus favorable

Certes, les pâtes apportent beaucoup de glucides à un moment où nous en avons besoin mais leur cuisson est parfois excessive lors des repas en collectivité comme la pasta-party augmentant ainsi l’index glycémique du repas ce qui ne paraît pas judicieux. Malheureusement, si vous voulez des pâtes à index glycémique bas, il faudra privilégier des pâtes complètes particulièrement riches en fibres qui pourraient causer des désagréments lors d’une compétition.

Que penser de la présence de gluten ?

Rappelons que nous ne réagissons pas tous de la même façon face au gluten. Certains (et heureusement ce sont les moins nombreux) sont atteints de maladie cœliaque (intolérance au gluten) et pour eux le gluten doit être totalement éliminé. D’autres sont sensibles au gluten et la suppression de cette protéine améliore leur bien-être. Enfin, la majeure partie des personnes est a priori non impactée par le gluten.

Une étude récente (1) a analysé l’impact de la gliadine (constituant majeur du gluten) sur la paroi intestinale de patients atteints de maladies cœliaque, de patients sensibles au gluten et de patients « contrôles » ne présentant pas de réaction spécifique au gluten. Pour cela, des biopsies duodénales ont étés réalisées avant d’ « infuser » avec ou sans gliadine. Il a été constaté une augmentation de la perméabilité intestinale dans TOUS les groupes même si l’effet était plus marqué sur les biopsies provenant de patients sensibles au gluten et de patients cœliaques. Certes, cette étude était limitée à 25 patients et ses conclusions sont donc à prendre avec mesure mais ses résultats amènent à réfléchir surtout pour les sportifs d’endurance. En effet, on sait qu’un effort intense et prolongé est à lui seul un facteur de risque d’hyperperméabilité intestinale. Or, cette hyperperméabilité intestinale pourrait favoriser l’apparition de troubles digestifs en course et de risques pour la santé en laissant pénétrer au sein de notre organisme des choses qui devraient rester à l’extérieur (microbes, fragments protéiques mal digérés, toxiques…). Est-il judicieux d’ajouter un autre facteur (gluten) accroissant la perméabilité intestinale quand on peut faire autrement ?

Une autre étude (2) s’est intéressée à l’impact de la prise de gluten sur l’inflammation. Il a alors été constaté que la prise de gluten pourrait favorisée l’inflammation (augmentation de l’alpha 2 macroglobuline) indépendamment de la présence ou pas de maladie cœliaque. Or, rappelez-vous cet article dans lequel je vous avais parlé du caractère pyrogène (qui fait augmenter la chaleur) de l’inflammation et de son impact possible sur les performances (notamment quand il fait chaud). Mieux vaut éviter de majorer le risque d’inflammation alors que l’effort que nous allons produire peut déjà suffire pour créer un état inflammatoire !

En conclusion

Ces deux études m’ont amené à réfléchir encore un peu plus à mes derniers repas avant une course et à m'interroger davantage sur l'utilité de la pasta-party à propos de laquelle j’étais déjà prudent.

Cela me conforte dans mes choix les plus récents qui m’avaient amené à restreindre le gluten à l'approche d'une compétition tout en n’étant ni intolérant ni sensible au gluten. Le riz basmati peut, par exemple, être une bonne alternative grâce à son index glycémique bas et son faible risque d’accélération du transit.

Bien entendu, cette préoccupation à propos de la pasta-party doit aussi concerner les tout derniers repas avant compétition (petit déjeuner compris).

 

(1) Hollon J, Puppa EL, Greenwald B, Goldberg E, Guerrerio A, Fasano A. Effect of gliadin on permeability of intestinal biopsy explants from celiac disease patients and patients with non-celiac gluten sensitivity. Nutrients. 2015 Feb 27;7(3):1565-76

(2) Jamnik J, García-Bailo B, Borchers CH, El-Sohemy A. Gluten Intake Is Positively Associated with Plasma α2-Macroglobulin in Young Adults. J Nutr. 2015 Apr 8. 

Auteur

Fabrice Kuhn

Médecin généraliste, médecin du sport

Fabrice Kuhn est médecin du sport, rédacteur pour "Jogging International", auteur et conférencier. Athlète accompli, il est finisher des championnats du monde Ironman à Hawaii et du marathon des sables. Enseignant au DU d’expertise en course à pied de l’université de Poitiers, il a également été le médecin de l’équipe de France d’haltérophilie.

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