Teneurs en glucides, lipides, graisses, sel... fixent bien souvent la manière de classer les aliments selon leurs effets supposés sur la santé. Mais si cette manière de faire, qui a mené par exemple à l'étiquetage nutritionnel français, était en réalité dépassée ? C'est ce que pensent les tenants de la classification internationale NOVA. Cette dernière a été élaborée en 2010 par Carlos Monteiro, professeur de nutrition et de santé publique à l’université de Sao Paulo (Brésil) et popularisée en France par le Dr Anthony Fardet.
Elle distingue quatre groupes d’aliments selon leur degré de transformation.
Le groupe 1 : Les aliments bruts ou peu transformés
Les aliments non transformés (bruts ou naturels) sont les parties comestibles des végétaux (graines, fruits, feuilles, tiges, racines) ou des animaux (muscles, abats, oeufs, lait), les champignons, les algues, et l’eau.
Les aliments peu transformés sont des aliments naturels soumis à un ou des traitements, essentiellement physiques, qui ne modifient pas substantiellement les propriétés nutritionnelles et le mode de consommation des aliments d’origine.
Le groupe 1 inclut aussi les associations d’aliments bruts tels que les mélanges de fruits secs, les mélanges de fruits secs et de fruits à coques sans sucre, miel et huile ajoutés, le « granola » (un mélange d’avoine, d’amandes et de miel apparenté au muesli) ; les aliments complémentés avec des vitamines et des minéraux généralement ajoutés pour remplacer les nutriments perdus durant la transformation. Les aliments du groupe 1 peuvent contenir, mais c’est rare, des additifs.
Le groupe 2 : Les ingrédients culinaires
Ce sont des substances extraites du groupe 1 par des transformations physiques et chimiques, telles que le pressage, le raffinage, la meunerie, le broyage et le séchage par pulvérisation, ou provenant directement de la nature comme le sel. Elles ont des propriétés et des usages nutritionnels très différents des aliments entiers originaux. L’objectif de ces transformations est de fabriquer des produits utilisables pour préparer, assaisonner et cuire les aliments du groupe 1 afin d’élaborer des plats « faits maison » : soupes, bouillons, pains, conserves, salades, boissons, desserts et autres préparations culinaires diversifiées et agréables.
Les produits qui associent deux éléments du groupe 2 comme le beurre salé, des éléments du groupe 2 enrichis en minéraux ou vitamines (sel iodé) et le vinaigre fabriqué par fermentation acétique du vin ou d’autres boissons alcoolisées restent dans ce groupe.
Les éléments du groupe 2 peuvent contenir des additifs ayant pour fonction de préserver les propriétés originales de l’aliment.
Exemples : huiles végétales, farines, sel, sucres, vinaigre...
Le groupe 3 : Les aliments transformés
Les produits transformés sont relativement simples et sont fabriqués essentiellement à partir d’un aliment brut ou peu transformé du groupe 1 auquel on ajoute sel, sucre ou une autre substance culinaire du groupe 2 comme l’huile ou le vinaigre. La plupart des aliments transformés sont donc constitués d’un ou deux ingrédients. Les procédés de transformation incluent des méthodes de conservation et de cuisson variées, et dans le cas du pain et du fromage, des fermentations non alcooliques. Le but principal de la fabrication des aliments transformés est d’augmenter la « durée de vie » des aliments du groupe 1, ou de modifier ou d’améliorer leurs qualités sensorielles. Les aliments transformés peuvent contenir des additifs ayant pour but de conserver les propriétés originales de l’aliment ou de résister à la contamination microbienne.
Les boissons alcoolisées produites par fermentation des aliments du groupe 1 comme la bière, le cidre et le vin sont classées dans le groupe 3.
Le groupe 4 : Les aliments ultra-transformés
Ce sont des formulations industrielles réalisées typiquement à partir de cinq ingrédients ou plus, voire beaucoup plus. Ces ingrédients sont souvent ceux utilisés dans les aliments transformés tels que le sucre, le sel, les huiles, les autres matières grasses, des antioxydants, des stabilisants et des conservateurs. Mais il y en a des spécifiques. Les ingrédients que l’on ne trouve que dans les aliments ultra transformés incluent :
- des substances non communément utilisées en cuisine à la maison comme la caséine, le lactose, le lactosérum, le gluten, les huiles hydrogénées, les protéines hydrolysées, les maltodextrines, le sucre inverti, etc.
- des additifs dont le but est d’imiter les qualités sensorielles des aliments du groupe 1 ou de masquer les qualités sensorielles indésirables des produits finaux : les colorants, les arômes, les exhausteurs de goût, les édulcorants, les épaississants, les agents de charge, les agents antiagglomérants, les émulsifiants, etc.
Plusieurs procédés industriels sans aucun équivalent domestique sont utilisés dans la fabrication des produits ultra transformés, comme l’extrusion, le moulage et les prétraitements pour la friture. L’objectif principal de l’ultra-transformation industrielle est de créer des produits prêts à l’emploi ou à être chauffés, destinés à remplacer les aliments bruts ou peu transformés qui eux, sont naturellement prêts à être consommer comme les fruits, fruits à coque, le lait, l’eau, les boissons, plats, desserts et repas fraîchement préparés.
Les attributs communs des produits ultra transformés sont l’hyperpalatabilité, des emballages sophistiqués et attrayants, des allégations santé, une forte rentabilité économique, et le fait de porter la marque d’une compagnie transnationale (Nestlé, Danone, Mars, Kraft…).
Une classification validée par la science
La classification NOVA est aujourd’hui reconnue par les décideurs politiques dans les rapports de la FAO et de la Pan American Health Organization. Elle est à la base des principales recommandations du guide national brésilien pour l’alimentation et la nutrition. Elle est validée comme un outil pour la recherche en nutrition et en santé publique. D’ailleurs, depuis 2010, des études scientifiques ont été régulièrement publiées sur la base de la classification NOVA.
Au Brésil, elle a été utilisée, notamment, pour évaluer :
- les changements dans le temps des habitudes alimentaires ;
- l’impact de la consommation de produits ultra-transformés sur le contenu alimentaire en macro- et micronutriments ;
- l’association entre la consommation de produits ultra transformés et l’obésité ;
- l’influence de l’environnement alimentaire et de la publicité sur la consommation de produits ultra-transformés.
Aux États-Unis, la classification NOVA a été utilisée pour évaluer l’impact des produits ultra-transformés sur la consommation de sucre ajouté. Au Royaume-Uni, elle a été utilisée pour étudier les habitudes d’achats alimentaires des ménages en fonction des prix relatifs des produits alimentaires, et pour estimer la réduction potentielle du risque de maladies cardiovasculaires dès lors que l’on réduit la consommation de produits ultra-transformés.
Au total, ces études et toutes les autres menées dans des dizaines de pays à travers le monde montrent que :
- la production et la consommation de produits ultra-transformés augmentent de façon exponentielle ;
- les produits ultra-transformés prennent la place dans les habitudes alimentaires, des aliments non transformés ou peu transformés ;
- ils remplacent les plats et les repas fraîchement préparés à partir d’aliments non transformés ;
- ils font l’objet d’un marketing agressif ;
- ils ont un impact négatif colossal sur la qualité de l’alimentation humaine ;
- ils ont de graves conséquences sur la santé en termes d’obésité, de diabète, de syndrome métabolique et de profil lipidique (taux de cholestérol, triglycérides dans le sang).
Pour en savoir plus sur la classification NOVA et sur comment elle peut nous aider à gagner 10 ans d'espérance de vie en bonne santé, lire Halte aux aliments ultra transformés ! Mangeons vrai