Quel entraînement durant l'intersaison?

Quel entraînement durant l'intersaison?

S'il est important de réaliser une coupure, il est aussi intéressant de conserver les acquis de la saison qui vient de prendre fin. La coupure permet de se ressourcer physiquement et psychologiquement pour attaquer la saison à venir dans des conditions optimales. Cependant, il faut veiller à ne pas perdre les bénéfices du travail des mois d’entraînement précédents. Existe-il un programme idéal ? Comment s’entraîner et éviter la chute des qualités sportives tout en évitant la fatigue physique et psychique d’un entraînement poussé sans repos suffisant ?

Seriez-vous tenté par un arrêt sportif complet prolongé ?

Une étude de 2009 (1) s'est intéressée au cas de kayakistes de très haut niveau. Les sportifs étaient répartis en deux groupes, le groupe TC arrêtait totalement les activités sportives durant 5 semaines alors que le groupe RT réduisait son entraînement durant 5 semaines. Chaque semaine, le groupe RT pratiquait donc une séance d'entraînement de la force et deux séances d'endurance (40 mn à 80% VO2max).
Les deux groupes ont vu leurs paramètres de la performance diminués mais moins chez les sportifs ayant conservé un minimum d’entraînement que les sportifs ayant tout arrêté. Ainsi, en 5 semaines la Vo2 max a baissé de 10.1% dans le groupe TC et de 4.8% dans le groupe RT. Durant ces 5 semaines, le seuil a, quant à lui, baissé de 8.8% dans le groupe TC et de 5.7% dans le groupe RT.
Un arrêt complet est donc, logiquement, suivi d’une plus grande baisse des caractéristiques physiologiques de la performance qu'un entraînement léger avec trois séances d'entraînement par semaine. D'ailleurs, il ne serait pas venu à l'esprit de la plupart d'entre nous de s'arrêter totalement. Ne serait-ce que parce que l'entraînement nous aurait manqué !
Une première conclusion s’impose donc : pas d'arrêt total prolongé en fin de saison.

Quel entraînement serait le plus adapté pour maintenir ses qualités physiques ?

Pour répondre à cette question Rønnestad et ses collègues se sont intéressés à des cyclistes bien entraînés (2).
Lors de cette étude les cyclistes choisissaient eux même l’un des deux groupes dont ils allaient suivre le programme d'entraînement en fin de saison. Le groupe EXP suivait un programme associant diminution de l’entraînement total, maintien d’un entraînement à faible intensité et maintien d’une séance d'entraînement à haute intensité tous les 7 à 10 jours (5x6 mn en alternance avec 6x5mn à plus de 88% de FCmax, temps de récupération égal à la moitié du temps de travail). Le groupe TRAD suivait un entraînement uniquement focalisé sur des intensités faibles.
Tous les athlètes étaient testés une première semaine après leur dernière compétition de la saison, après 8 semaines d'intersaison et après 16 semaines de préparation pour la nouvelle saison (soit 24 semaines après la dernière compétition). Lors des 16 dernières semaines (les premières semaines de la préparation pour la saison à venir) le programme était libre.
L'entraînement était suivi et analysé en fonction de la fréquence cardiaque. Les efforts étaient répartis selon 3 zones d’intensité (zone 1 à basse intensité entre 60% et 82 % de FC max, zone 2 à intensité modérée entre 83% et 87% de FC max et zone 3 à intensité élevée au-dessus de 88%).
Lors des dernières semaines de la saison, les cyclistes relevaient leur activité sportive. Pour les deux groupes, à ce moment la durée hebdomadaire d’entrainement était proche de 10 h. Durant l’intersaison, la durée hebdomadaire d’entraînement se situait aux alentours de 6.7 heures (groupe EXP) et de 7.3 h (groupe TRAD). Bien que la répartition des intensités d'entraînement fût différente lors de l'intersaison (principe de l'étude), elle ne le fût pas lors de la phase préparatoire de la saison suivante. Ainsi, lors de l’intersaison le groupe TRAD ne passait en moyenne que 0.4 h/semaine (24 mn) en zone 2 et 0.1 h/semaine (6 mn) en zone 3 alors que le groupe EXP passait 0.3 h/semaine (18 mn) en zone 2 et 0.4 h/semaine (24 mn) en zone 3. Bien que libre, la répartition des intensités lors de l’entraînement durant phase préparatoire de 16 semaines ne différait pas entre les deux groupes.

L’analyse des tests montrait que le groupe EXP voyait sa VO2max moyenne évoluer de 69±6 mL/kg/mn avant l'intersaison, à 69±8 mL/kg/mn en fin d'intersaison et enfin 71±8 mL/kg/mn après les 16 semaines de préparation. Pour le groupe TRAD, les VO2max moyennes étaient respectivement de 68±5 mL/kg/mn, 65±3 mL/kg/mn et 69±6 mL/kg/mn.
Les puissances max moyenne du groupe EXP étaient de 5.76±0.55 W/kg, 5.77±0.72 W/kg et 5.84±0.73 W/kg (avant intersaison, après intersaison et après période préparatoire). Pour le groupe TRAD, les puissances max moyennes mesurées étaient respectivement 5.73±0.67 W/kg, 5.62±0.5 W/kg et 5.68±0.64 W/kg.
Les fractions de VO2max à 4 mmol/L de lactates étaient dans le groupe EXP de 77±5 %, 78±4 % et 82±6 % (avant intersaison, après intersaison et après période préparatoire). Pour le groupe TRAD, les fractions de VO2max à 4 mmol/L de lactates étaient respectivement de 79±4 %, 77±7 % et 78±8 %.
Au cours des tests étaient réalisés des contre-la-montre de 40 mn. Entre le premier test (fin de saison) et le dernier test (fin de période préparatoire), la puissance moyenne développée lors de ces contre-la-montre s’est améliorée de 7.7% en moyenne dans le groupe EXP contre 1.9% dans le groupe TRAD). Il faut noter qu'alors que la puissance moyenne au cours du contre-la-montre a légèrement augmenté lors de la période de transition chez le groupe EXP, elle a légèrement baissée dans le même temps dans le groupe TRAD.

En conclusion

Durant l’intersaison, il est important de se ressourcer mais garder des séances d’intensité (au moins une tous les 7 à 10 jours) peut permettre de repartir sur de bonnes bases pour la saison à venir). Cela peut permettre d’effectuer, au moins le début de saison avec de meilleurs paramètres physiologiques de la performance en endurance.
Toutefois, l’étude ne dit pas si la différence entre les deux groupes se maintenant sur le reste de la saison ou si, au fur et à mesure de la saison, la différence se comblait. En outre, les séances d’intensité utilisées (5x6 mn ou 6x5 mn) sont des séances assez difficiles à réaliser.
Finalement, tout cela n’est pas très surprenant, mais cette étude permet de confirmer ce que l’on pouvait envisager.
 En fin de saison, ne stoppez donc pas totalement votre entraînement et gardez quelques séances d’intensité.

Sources
(1)    García-Pallarés J, Carrasco L, Díaz A, Sánchez-Medina L. Post-season detraining effects on physiological and performance parameters in top-level kayakers: comparison of two recovery strategies. J Sports Sci Med. 2009 Dec 1;8(4):622-8.
(2)    Rønnestad BR, Askestad A, Hansen J. HIT maintains performance during the transition period and improves next season performance in well-trained cyclists. Eur J Appl Physiol. 2014 Sep;114(9):1831-9.

Auteur

Fabrice Kuhn

Médecin généraliste, médecin du sport

Fabrice Kuhn est médecin du sport, rédacteur pour "Jogging International", auteur et conférencier. Athlète accompli, il est finisher des championnats du monde Ironman à Hawaii et du marathon des sables. Enseignant au DU d’expertise en course à pied de l’université de Poitiers, il a également été le médecin de l’équipe de France d’haltérophilie.

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