LaNutrition.fr : Vous avez débuté en tant que journaliste. Parlez-nous un peu de cette expérience.
Max Lugavere : Lorsque j'ai obtenu mon diplôme universitaire, j'ai été embauché par une chaîne de télévision fondée par l'ancien vice-président des États-Unis, Al Gore. Il s'agissait d'un nouveau réseau d'information qui cherchait à redéfinir le journalisme pour les jeunes, en permettant aux téléspectateurs de co-créer le contenu diffusé à la télévision. J'ai été présentateur sur la chaîne pendant six ans, couvrant une myriade de sujets différents et travaillant avec des producteurs qui avaient lancé la carrière de nombreux journalistes aujourd'hui connus dans le monde entier. Je disposais d'une certaine autonomie et, si je couvrais souvent de grands sujets allant de la politique à l'environnement, je ramenais régulièrement l'attention sur des thèmes qui m'intéressaient particulièrement, comme la santé et la technologie.
LN : Pourquoi avoir écrit La Nutrition du cerveau ?
M. L. : Ma passion, qui se retrouve dans tout mon travail, est de mettre fin à la souffrance en aidant les gens à faire de meilleurs choix dans leur alimentation et leur mode de vie. Aujourd'hui, les principales causes de maladie et d'invalidité sont les maladies non transmissibles comme les maladies cardiaques, le cancer, la démence et le diabète de type 2. Notre espérance de vie augmente, mais notre espérance de vie en bonne santé, c'est-à-dire le nombre d'années passées en bonne santé, diminue. Dans la mesure où l'alimentation et le mode de vie ont un impact sur ces pathologies, mon objectif est d'aider les gens à mieux comprendre comment se nourrir et nourrir leurs proches pour prolonger le nombre d'années qu'ils peuvent passer en bonne santé. Mes recherches ont commencé lorsque ma mère a développé une démence à un jeune âge, si bien qu'une grande partie de mon travail se concentre sur la façon de protéger notre cerveau - notre organe le plus vulnérable.
LN : Comment suivez-vous l'évolution des connaissances et quelle est, selon vous, la découverte récente la plus importante concernant la prévention de la dégradation du cerveau ?
M. L. : Je parcours continuellement la littérature scientifique à la recherche d'études nouvelles et pertinentes. La découverte la plus importante que nous ayons faite est que nos choix peuvent effectivement affecter la santé de notre cerveau. Quatre-vingt dix pour cent de ce que nous savons sur la maladie d'Alzheimer, la forme la plus courante de démence, n'a été découvert qu'au cours des 15 dernières années. Il y a quelques dizaines d'années encore, on pensait que l'on devait faire avec le cerveau avec lequel on était né, mais nous savons maintenant que notre cerveau peut changer grâce à ce que les chercheurs appellent la neuroplasticité. Nous pouvons influencer le fonctionnement de notre cerveau et le protéger contre les maladies et les dégénérescences.
LN : Pour rendre notre cerveau plus sain et plus puissant, par quoi commencer ? L'alimentation ?
M. L. : Si je devais choisir un domaine par lequel commencer, je dirais, sur la base de la force des preuves, que l'exercice est roi. C'est un médicament pour le cerveau. Si vous êtes une personne sédentaire, le simple fait d'ajouter plus de mouvement à votre journée changera la donne. Mais l'exercice est particulièrement puissant car il peut réellement contribuer à améliorer l'architecture de votre cerveau, à optimiser son fonctionnement et à vous aider à éviter les maladies. Visez 150 minutes d'exercice d'intensité modérée par semaine, ce qui contribue à stimuler le facteur neurotrophique dérivé du cerveau ou BDNF, un facteur de croissance qui favorise la formation de nouvelles cellules cérébrales. L'exercice est aussi efficace que les médicaments pour maintenir une tension artérielle saine, ce qui peut prévenir une déficience cognitive légère, une forme de pré-démence. Enfin, il stimule les substances neurochimiques qui favorisent l'apprentissage et la mémoire. Aucun médicament sur le marché n'arrive à la cheville de ce que fait l'exercice pour le cerveau.
LN : Quels seraient les trois principaux changements à apporter à notre alimentation ?
M. L. : Réduire au minimum les aliments ultra-transformés. Il s'agit d'aliments emballés, stables en rayon et généralement composés de nombreux ingrédients. Passer à l'utilisation d'huiles plus saines en abandonnant les huiles raffinées et en privilégiant l'huile d'olive extra vierge de première pression à froid. Des études montrent que l'huile d'olive extra-vierge améliore la santé vasculaire et stimule le nettoyage des déchets dans notre cerveau. Et manger plus de protéines, idéalement issues de vaches nourries à l'herbe et de poissons gras sauvages. La consommation de protéines est associée à une réduction de l'accumulation de substances amyloïdes dans le cerveau, ainsi qu'à une moindre fragilité au fur et à mesure que l'on vieillit, car elle empêche la dégradation des protéines musculaires et favorise leur synthèse. Ces aliments riches en protéines sont également riches en nutriments qui soutiennent le cerveau, comme la choline, la créatine, la vitamine B12 et le zinc.
"...l'exercice est roi. C'est un médicament pour le cerveau. Si vous êtes une personne sédentaire, le simple fait d'ajouter plus de mouvement à votre journée changera la donne. [...] Aucun médicament sur le marché n'arrive à la cheville de ce que fait l'exercice pour le cerveau."
LN : Qu’est-ce qui pourrait avoir un autre impact majeur sur la santé du cerveau ?
M. L. : L'une des choses les plus importantes que vous puissiez faire pour garder votre cerveau en bonne santé, c’est maintenir une pression artérielle saine. Le cerveau dépend de la santé vasculaire, et nous savons que l'hypertension artérielle est un facteur indépendant du risque de démence, car elle peut entraîner des dommages neurovasculaires qui entravent la circulation sanguine. Des études montrent qu’une seule boisson sucrée peut augmenter la pression artérielle jusqu'à deux heures après l'avoir ingérée, alors laissez tomber les boissons sucrées, notamment les jus de fruits ! Si vous souffrez déjà d'hypertension, les méta-analyses montrent que l'exercice régulier est tout aussi efficace que les médicaments.
LN : Vous préconisez de passer beaucoup de temps à l'extérieur. Pourquoi ?
M. L. : Passer plus de temps dans la nature est crucial à plusieurs égards. Il est important de respirer de l'air frais, car la pollution atmosphérique a été associée au déclin cognitif et à un risque accru de démence. Être dehors nous permet également de nous exposer au soleil, ce qui stimule la production de vitamine D dans la peau et favorise la libération de monoxyde d’azote, qui soutient la santé de notre système vasculaire dont dépend la santé de notre cerveau. L'exposition à la lumière solaire ambiante agit également comme un "zeitgeber", ou donneur de temps, qui synchronise le rythme circadien de notre corps, ce qui nous aide à mieux dormir la nuit. Elle favorise une fonction immunitaire saine. Enfin, le contact avec la nature nous aide à atténuer le stress, alors que le stress chronique est à l'origine du déclin cognitif.
"Passer plus de temps dans la nature est crucial à plusieurs égards. Il est important de respirer de l'air frais, car la pollution atmosphérique a été associée au déclin cognitif et à un risque accru de démence."
LN : Y a-t-il des médicaments que l'on devrait envisager de prendre en vieillissant ?
M. L. : Je ne recommande aucun médicament.
LN : Conseillez-vous de prendre des compléments alimentaires ? Lesquels ?
M. L. : Oui, mais il n'y a pas d'approche unique de la supplémentation ou du régime alimentaire qui fonctionne pour tout le monde. Pour les personnes qui ne mangent pas régulièrement du poisson, je recommande un supplément d'huile de poisson de haute qualité. Pour les personnes qui ne s'exposent pas régulièrement au soleil ou qui présentent un risque de carence en vitamine D, l'un des principaux facteurs de risque environnementaux de la démence, je recommande de prendre 4000 à 5000 UI de vitamine D. J'aime beaucoup l'astaxanthine comme complément général pour la santé du cerveau et de la peau, et je pense que le magnésium est un excellent minéral à prendre, car la moitié des adultes ne consomment pas les quantités requises et le magnésium a des effets considérables sur de nombreux processus qui maintiennent le cerveau en bonne santé. Le psyllium (Plantago ovata) n’est pas un nutriment mais c’est un complément fantastique pour sa capacité à aider à piéger les particules de cholestérol-LDL dans l'intestin. Cette plante favorise également la sensation de satiété, ce qui permet de l'utiliser comme aide au régime.