L’alimentation en course reste souvent problématique et est, avant tout, un compromis. Il faut apporter suffisamment de glucides sans créer de troubles digestifs tout en s’assurant d’une assimilation optimale pour maintenir l’effort sans perturber le métabolisme.
On conseille habituellement environ 30 g/ h pour un effort de 1 à 2 h, 60 g/ h pour un effort de 2 à et 90 g/h pour les efforts de plus de 3 h. Plusieurs formes de glucides existent.
Les boissons apportent en moyenne entre 4 et 5 g de glucides pour 100 mL soit 40 à 50 g par bidon de 500 mL. Pour ces boissons, l’idéal est en mélange de glucides (glucose et fructose). Vous trouverez dans « Nutrition de l’endurance » des explications plus précises et un comparatif des boissons de l’effort (avec nos préférences). Il serait difficile cependant de ne se servir que des boissons comme source de glucides, surtout sur des épreuves de longue durée.
Les gels et barres constituent une alternative et un complément aux boissons mais leur tolérance est variable selon les produits et selon les individus.
Les aliments naturels (bananes, fruits secs…) sont intéressants mais parfois difficiles à mâcher (comme les barres d’ailleurs) et leur teneur en glucides parfois un peu faible par rapport au poids total. D’ailleurs, je vous avais déjà parlé de la pomme de terre dans cette utilisation.
Les pistes sont donc toujours à explorer. Les fabricants s’y attellent. On trouve dorénavant des bonbons, des purées de fruits, des gels de consistance variable, des boissons aux hydrogels censées être plus facilement assimilables mais dont les résultats ne sont pas encore scientifiquement prouvés.
Le but est de trouver une forme compacte, facile à mâcher et à avaler ne créant pas de troubles digestifs tout en apportant suffisamment de glucides. Et pour corser le tout, une saveur agréable, pas trop sucrée, est aussi requise. Idéalement, il faudrait (surtout pour les longs efforts) que les glucides soient un mélange de glucose et fructose. L’équation n’est pas simple !
Et si on se faisait un gâteau patate douce-riz ?
Je sais que certains utilisent de la purée de patate douce sur certains ultra-trails. Avez-vous déjà goûté à un gâteau à la patate douce comme les Réunionnais savent le faire ? C’est une superbe expérience ! J’en ai goûté et fait quelques-uns avec succès mais mon meilleur souvenir est un gâteau à la patate douce mangé sur le Piton de la Fournaise. J'en ai encore l’eau à la bouche !
Revenons aux choses sérieuses avec une petite étude récente (6 cyclistes) qui a testé un gâteau de patate douce-riz. Cette étude japonaise a repris la base d’un gâteau de riz en le modifiant pour en faciliter la mastication. Ils ont effectué plusieurs tests : de saveur, de mastication et test en course pour analyser le métabolisme.
Ils ont utilisé du riz gluant pour plusieurs raisons : index glycémique élevé (ce qui est recommandé durant l’effort), forte teneur en glucides et facilité d’assimilation et de digestion.
Pour tester cela, rien de plus facile qu’une petite épreuve de vélo en laboratoire ! 1 h à 80% de VO2max puis un contre-la-montre d’environ 8 min. Deux épreuves avec des glucides ingérés au tout début de l’effort puis à 30 et 60 min et enfin juste après l’effort. Gel et portion de gâteau patate douce-riz étaient isocaloriques (80 kcal) mais le gel apportait 20 g de glucides pour 80 g de produit et le gâteau 18,5 g de glucides pour 50 g de produit.
Plusieurs paramètres étaient mesurés : glycémie, lactatémie, quotient respiratoire (témoignant du mélange glucides/lipides utilisé lors de l’effort), consommation d’oxygène, fréquence cardiaque et RPE (échelle de perception de l’effort).
Les résultats de l'étude
En bouche, le gel nécessitait 6 mouvements de mastication pour 12 secondes de mastication et 13 secondes pour l’avaler contre 17 mouvements de mastication pour 13 secondes de mastication et 18 secondes pour avaler pour le gâteau patate douce-riz.
En bouche, le gâteau de riz gluant (classique) nécessitait quant à lui 35 mouvements de mastication pour 26 secondes de mastication et 29 secondes pour l’avaler. Le gâteau patate douce-riz était donc bien plus facile à mastiquer et avaler.
Des paramètres métaboliques mesurés durant l’effort (glycémie, lactatémie, quotient respiratoire, consommation d’oxygène, fréquence cardiaque et RPE), seule différait la fréquence cardiaque, plus élevée durant l’effort avec le gâteau patate douce-riz. Le profil métabolique restait donc identique.
L’analyse gustative révélait une saveur moins sucrée pour le gâteau patate douce-riz que pour le gel. La palatabilité (facilité d’ingestion) ne différait pas. La sensation de soif tendait à être moins prononcée avec le gâteau mais sans différence significative. En fin d’effort, la faim était plus prononcée avec le gel.
Les temps mis pour effectuer le contre-la-montre ne différaient pas significativement.
En conclusion
C'est une étude intéressante qui, malheureusement, ne concerne qu'un trop petit nombre de participants. Il faudrait en faire une avec plus de sportifs et sur un temps d’effort plus long que 1h08. On peut aussi déplorer ne pas connaître la répartition glucose/ fructose des deux portions glucidiques.
Bonus : la recette utilisée par les chercheurs
Ingrédients : 100 g de farine de riz gluant, 20 g de sucre de table, 150 g d’eau.
Préparation : Mixer le tout. Faire cuire 200 g de patate douce à la vapeur. En faire une purée. Mélanger le tout et mixer. Faire des petites portions (50 g pour être équivalent à un gel). Les mettre dans un sac plastique sous vide puis les cuire au four à vapeur à 100°C durant 10 min.
À l’heure où j’écris l’article, je n’ai pas encore essayé la recette. N’hésitez pas à me dire si vous la testez.
Référence
Ishihara K, Taniguchi H, Akiyama N, Asami Y. Easy to Swallow Rice Cake as a Carbohydrate Source during Endurance Exercise Suppressed Feelings of Thirst and Hunger without Changing Exercise Performance. J Nutr Sci Vitaminol (Tokyo). 2020;66(2):128-135.